La réforme : quel rôle dans la controverse ?

 

Globalement, la controverse a fait surgir et s’exprimer un grand nombre de débats et de points de désaccord, voire de fracture entre les acteurs. Ils n’ont pas été dans une logique de consensus.

Néanmoins,  tous ont respecté une certaine éthique de la responsabilité, et comme l’explique Philippe Caïla, il n’y a pas eu « d’ascension aux extrêmes » :

« Au fond, ils se sont tenus à leur rôle et ils l’ont exercé sans avoir la volonté de renverser l’autre, cela n’a pas été l’objet d’une forme de guerre civile. Quand on se souvient de la prédiction de Michel Rocard au sujet de la réforme des retraites dans ce pays, « il y a là de quoi faire tomber vingt gouvernements », heureusement elle a été démentie. Il voulait dire qu’il y avait de quoi faire une vingtaine de crises politiques. Il n’y a pas eu crise politique. Il y a eu un vrai débat de société de première importance. »

Pour analyser les oppositions qui se sont produites au cours de la controverse sur la réforme 2010, voir la rubrique De vives oppositions…

De vives oppositions…

Dans le cadre général de la controverse sur les retraites, la réforme de 2010 a été le catalyseur de vives oppositions entre les différents acteurs politiques. En effet, tout d’abord le gouvernement a porté le projet de loi avec une certaine fermeté. Certes les autres acteurs, et notamment les syndicats, ont été pris en compte, mais dans l’ensemble le gouvernement a voulu mettre en place une réforme efficace, sans chercher le consensus. Ainsi, Philippe Caïla explique (voir l’interview de Philippe Caila) : « Je trouve que les acteurs ne sont pas dans une logique de consensus ou de compromis, on n’a pas eu d’accord. En 2003, il y avait eu un accord validé par la CFDT avec le gouvernement et la CGT. Là, il n’y en a pas eu. ».

 

Les syndicats ont appelé à la manifestation pour exprimer leur opposition à la réforme, qui s’est cristallisée notamment sur les cas particuliers en termes de retraite, par exemple les carrières longues et la question de la pénibilité. Par ailleurs, l’opposition, et notamment le Parti Socialiste et l’extrême gauche, s’est exprimée contre cette réforme, en mettant en avant une alternative pour financer les retraites consistant à taxer davantage le capital.

Néanmoins, l’opposition n’était pas totalement unie quand à la question de l’allongement de la durée de cotisation. Ainsi les acteurs du PS semblent globalement s’accorder à dire que cet allongement est nécessaire et souhaitable, tandis que les acteurs d’extrême gauche y restent très fermement opposés. En outre, les acteurs d’extrême gauche et les altermondialistes ont contesté la nécessité même de la réforme, due au problème de financement des retraites en raison des évolutions démographiques, en mettant en avant l’idée d’un changement radical de système.

Cependant, l’opposition n’a pas radicalisé sa position et il n’y a pas eu d’ « ascension aux extrêmes » : voir la rubrique …mais dans une logique responsable

…mais dans une logique responsable

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Pourtant, comme le rappelle Philippe Caïla, malgré les vives oppositions mises en jeu dans cette controverse, tous les acteurs ont fait preuve d’une certaine responsabilité et aucun n’a fortement radicalisé sa position au point de déséquilibrer le débat.

Selon Philippe Caïla : « Je trouve que tous les acteurs ont été dans leur rôle. Le gouvernement a fait des mesures de politique publique, les caisses de retraite ont été dans des approches gestionnaires, les spécialistes des retraites ont éclairé les enjeux et les organisations syndicales ont défendu les intérêts des salariés. Dans tous les cas, ce n’est pas éthique de la responsabilité ou éthique de la conviction, on veut tous une pondération, c’est une question de critères, dans la part que l’on donne à l’un et à l’autre. Moi je trouve que d’abord les syndicats ont mis en avant une éthique de la conviction mais en faisant preuve de responsabilité. Ils n’ont pas été jusqu’au-boutistes dans la mobilisation sur les retraites. ».

Ainsi, si effectivement il y a eu de nombreuses grèves, celles-ci n’ont pas été organisées dans un but paralysant, mais bien dans une optique de contestation.

Philippe Caïla explique : « Les grands mouvements dans la rue se faisaient plutôt le week end, à la fois pour faire venir du monde, mais hors d’un contexte paralysant. […] Quand on regarde le film fin des manifestations et des grèves pour les régimes spéciaux, on remarque des formes de retenue. ».

De même, le gouvernement, quoique ferme, a montré des signes d’ouverture : « le gouvernement, qui a parfois montré de la fermeté, voire de la dureté, a su ouvrir des points et accorder une audience à des sujets qu’il ne portait pas lui. Alors c’est peut-être insuffisant, par exemple le sujet de la pénibilité, le sujet homme-femme, des sujets qu’il n’avait pas intégrés dans sa réforme, mais il a fait rentrer des convictions dans ses mesures. ».

En effet, le gouvernement a su prendre en compte les positions des autres acteurs pour proposer une réforme, qui ne correspond peut-être pas tout à fait à ce qu’il aurait voulu faire voter, mais qui correspond à la meilleure réforme qui pouvait être entreprise étant donné le contexte. C’est en ce sens que Vincent Chriqui déclare (voir l’interview de Vincent Chriqui) : « Cette réforme est ce qu’on pouvait faire de mieux au moment où on l’a faite. Cela ne veut pas dire qu’un peu plus tard, après les prochaines élections présidentielles, on ne pourra pas envisager une réforme plus radicale. »

Pour analyser les mesures prévues par la réforme, voir la page : Les mesures

Les mesures>>

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