La bataille du nom

Définition d’un syndrome et différence avec une maladie

Ensemble de signes, de symptômes, de modifications morphologiques, fonctionnelles ou biochimiques de l’organisme, d’apparence parfois disparate mais formant une entité reconnaissable qui, sans présager obligatoirement des causes de ces manifestations, permettent d’orienter le diagnostic.

Autrement dit, un syndrome est l’ensemble des signes et des symptômes qui caractérisent une maladie, mais la maladie ne doit pas être confondue avec le syndrome. En effet, l’absence de cause spécifique différencie en théorie le syndrome de la maladie.

Néanmoins, en pratique, beaucoup de personnes utilisent le terme de syndrome pour celui de maladie ou inversement.

Comment peut-on qualifier le syndrome de fatigue chronique ? Comment le lexique qui tourne autour du SFC est-il utilisé par les différents acteurs pour faire valoir leurs opinions ou leurs combats ?

Le champ lexical du Syndrome de Fatigue Chronique

La sémantique a une importance considérable dans le milieu médical.

Bien qu’on trouve des références au syndrome de fatigue chronique jusque dans les années 1750, ce n’est qu’en 1988 qu’il a formellement été reconnu en tant que maladie. Plus de 1 000 noms ont déjà décrit cet état (certains sont encore couramment utilisés), dont la neurasthénie, le syndrome postviral ou encore le syndrome des yuppies (« Young Urban Professionals »), puisqu’il frappe surtout à la jeune trentaine. Le syndrome de fatigue chronique est également souvent référencé sous le nom d’encéphalomyélite myalgique.

L’utilisation du vocabulaire par les différents acteurs de la controverse :

Les associations de patients jouent un rôle très important dans la controverse.

« Pour imposer leur réalité de la maladie, les associations de malades ont mis en œuvre des stratégies à la fois sociales –se couper des mondes sociaux porteurs d’une définition différente – et politiques –imposer au pouvoir politique qu’il reconnaisse officiellement la maladie et « les droits de tirage » sur l’argent public (subvention de la recherche, prise en charge des soins…) qu’elle implique. » (Marc Loriol)

Selon l’association française du syndrome de fatigue chronique, « Le SFC est une maladie complexe et hétérogène dont la prise en charge en réseau associant généralistes, spécialistes dont psychiatres, kinésithérapeutes et aides de vie obtient souvent une amélioration significative mais qui est à l’origine d’un handicap important et durable. » Cette définition du syndrome de fatigue chronique a été validée par un conseil scientifique constitué de nombreux médecins.

Le slogan de l’AFSFC est assez véhément quant à la qualification de maladie du Syndrome de Fatigue Chronique : « 2 syndromes = 2 maladies ».

Cette association aide les patients à faire valoir leur maladie auprès des assurances maladies et de leurs proches. On note que sur la page de présentation du site, le SFC est référencé sous le nom d’encéphalomyélite myalgique, alors qu’ils précisent bien en petits caractères que le nom le plus répandu au Canada pour ce syndrome est le Syndrome de Fatigue Chronique.

Il y a donc une volonté particulière de la part des militants de l’association de présenter le SFC sous le nom d’encéphalomyélite myalgique.

« Le SFC présente des similitudes avec l’encéphalomyélite myalgique (EM), et la plus récente définition clinique, publiée en 2003 par un comité d’experts formé par Santé Canada, désigne la maladie sous le double nom et avec l’acronyme EM/SFC. Cette définition clinique fait partie, avec des protocoles de diagnostic et de traitement, de ce qu’on appelle le ‹‹ Consensus canadien ››. »

L’EM/SFC est une maladie acquise (plutôt qu’une condition congénitale) qui affecte tous les systèmes du corps – principalement les systèmes neurologique, immunitaire et endocrinien – et qui peut être très invalidante.

« Par l’utilisation du mot syndrome, on attire l’attention sur le fait que cette maladie est une collection de signes et de symptômes qui, dans leur totalité, définissent cette maladie (C’est nous qui soulignons) ». Nous pouvons voir à travers cette citation que l’association insiste fortement sur leur volonté d’assimiler le SFC à une maladie.

Les médecins qui soutiennent les associations de patients utilisent délibérément la qualification de maladie pour parler du syndrome de fatigue chronique.

D’autres, plus réservés, préfèrent utiliser le terme de syndrome dans la mesure où selon eux, aucune cause n’a été réellement identifiée qui justifierait la qualification de maladie.

  • L’OMS

Dans la Classification internationale des maladies (CIM-10 ou, en anglais, ICD-10) publiée en 1992, le “syndrome de fatigue post-viral” (Post-Viral Fatigue Syndrome), qui est l’une des appellations du syndrome de fatigue chronique, porte le numéro G93.3 dans les maladies du système nerveux.
Le code 93.3 inclut aussi “l’encéphalomyélite myalgique bénigne”.

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