Alternatives et perspectives

Face à cette controverse, de nouveaux horizons s’ouvrent pour pallier aux multiples problèmes rencontrés. Cette page ne se propose pas de résoudre la controverse, mais bien seulement de présenter quelques idées et développements en cours qui continuent de nourrir le débat.

Les Réseaux Sociaux décentralisés

L’absence de contrôle sur les données que l’on fournit aux sites de réseaux sociaux peut soulever des craintes multiples. C’est pourquoi, en 2010, après la création de nouvelles fonctionnalités soulevant une nouvelle fois ces craintes quant à des données partagées avec des sites et des entreprises tierces, un groupe d’étudiants de l’université de New York ont voulu lever 10 000 $ pour passer leur été à construire Diaspora, un réseau décentralisé. Le résultat fut sans appel :  les utilisateurs frustrés de Facebook les ont aidés à hauteur de 200 000 $ ! [1]

Comme l’expliquent les créateurs de Diaspora, “dans la vie de tous les jours, on se parle, on n’a pas besoin de poster nos messages sur une plateforme qui les retransmet  à nos amis”. [2]

C’est sur ce principe là que se fondent les réseaux décentralisés. Au lieu que les données soient hébergées par un serveur possédé par le réseau social, chaque utilisateur reste maître de ses données et en donne l’accès aux autres membre via un protocole de Pair-à-Pair (P2P).[3]

C’est donc une alternative résolvant les problèmes de contrôle des données personnelles.

Ce problème est également semblable et finalement assez proche d’un autre : la question du “droit à l’oubli” sur internet.

Le droit à l’oubli

Le droit à l’oubli est une expression qui désigne la possibilité, pour reprendre M. Türck Président de la CNIL, de faire retirer sans délai d’un système informatique toutes les données nous concernant. Ce n’est actuellement pas possible, car même la suppression de comptes utilisateurs sur la plupart des sites web laisse intact les fichiers et données personelles qui restent enregistrées pour des périodes non déterminées.

Un tel droit serait un bouleversement de la gestion des données personelles telle que nous la connaissons. Il nécessiterait des textes précis, qui avant toute chose, devraient définir précisément les données personelles et les règles de diffusion (même indirecte) qui leur sont associées. Quelques mouvements ont eu lieu en ce sens avec, vers 2007-2008 la réduction du temps de conservation des logs sur les moteurs de recherche.

Mais, récemment, Yahoo vient d’annoncer une extension de cette durée. Le droit à l’oubli ne semble pas, a priori, parti pour s’imposer de facto.

Cette alternative est finalement une recherche de solution assez techniques aux problèmes qui sont moteurs de cette controverse. Cependant, face aux questions de surveillance mutuelle une autre optique est envisageable : plutôt que de chercher à modifier le système qui est la source des problèmes de surveillance, il paraît finalement plus logique de chercher à modifier les mœurs.

Apprendre à voir sans regarder[4]

Au lieu de blâmer les utilisateurs pour avoir parfois posté des photos compromettantes ou divulgué des informations personnelles confidentielles, la responsabilité pourrait être reportée sur celui qui observe. Comme le dit Jean-Marc Manach dans son livre intitulé La vie privée un problème de vieux cons, [5]“De même que porter une mini jupe ou bronzer les seins nus n’est pas une incitation au viol, l’exposition ou l’affirmation de soi sur les réseaux ne saurait justifier l’espionnage ni les atteintes à la vie privée”. Il faudrait donc éduquer le regard des gens afin de limiter le voyeurisme omniprésent sur ces réseaux, voyeurisme qui peut parfois impliquer une extraction des données observées, et une décontextualisation dangereuse car le cadre du réseau social est très particulier.

Ceci amène à une idée que Dominique Cardon a développé avec nous dans notre l’interview[6] qu’il nous a accordée.

Laisser une trace à chaque passage

Il y a de nombreux hoax sur le net qui offrent de connaître les amis Facebook qui ont visité notre profil. Selon Dominique Cardon, laisser une trace de son passage à chaque fois que l’on regarde le profil d’un membre du réseau permettrait d’éduquer le regard des utilisateurs. C’est d’ailleurs le cas sur des réseaux sociaux professionnels pour le recrutement tels que Linkedin.

Cette alternative permettrait ainsi d’avoir une relation de confiance avec les autres utilisateurs des réseaux sociaux.

[1] : BOYD, Dannah et HARGITTAI, Eszter. Facebook Privacy settings : Who cares ?

[2] : Vidéo de présentation du projet Diaspora*

[3] : MUSIANI, Francesca. When social links are network links :The dawn of peer-to-peer social networks and its implications for privacy

[4] : CARDON, Dominique. Entretien.

[5] : MANACH, Jean-Marc. La vie privée, un problème de vieux con

[6] : CARDON, Dominique. Entretien.