Le classement PISA

Depuis les dernières années, l'intérêt du gouvernement et des médias pour l'enquête internationale PISA a été croissante : cette évaluation est la première à donner une idée des performances des différents systèmes scolaires. C’est du moins la vision qui ressort du discours de nombreux acteurs français, considérant les résultats révélateurs d’un problème de notre système. Mais quels indicateurs permettent de l’imputer aux rythmes scolaires. ?

L’évaluation internationale des élèves ou PISA (Programme for International Student Assessment), organisée par l’OCDE dans 65 pays, permet de tester le niveau en lecture, en mathématique et en sciences des jeunes de 15 ans. Ce classement, établi tous les 3 ans, se base sur les résultats des épreuves passées par des élèves de 15 ans sélectionnées aléatoirement dans les écoles publiques ou privées dans chaque pays.

Ce classement semble depuis ces débuts en 2000 avoir acquis une certaine légitimité auprès de l’opinion publique française, qui ne cesse de le citer comme symptomatique des problèmes de notre école.

Le classement, que ce soit en 2000, 2003, 2006 ou 2009 redonne de l’impulsion à la rédaction d’articles sur le thème des rythmes scolaires. On constate de plus une tendance globale de « montée en popularité » du classement.

Comment, en tant que parents, se satisfaire des résultats de l’enquête Pisa 2010 ? L’école de nos enfants ne va pas bien et parallèlement, beaucoup de nos enfants ne sont pas bien à l’école. […] Le réaménagement des rythmes scolaires et des programmes est inéluctable. 1

PISA 2009 a mis sur le devant de la scène les nombreuses carences du système français, provoquées par le gouvernement actuel. Cette étude sociétale est la preuve que l’analyse émise par l’UNL et la majorité des partenaires syndicaux et associatifs sur l’état du système éducatif actuel est juste et réaliste. La pertinence de nos propositions est ici démontrée : les recommandations du rapport PISA pour améliorer chaque système éducatif concernent la pédagogie, le droit à l’éducation pour tous, la lutte contre la reproduction sociale et l’investissement de ressources suffisantes à des réformes efficaces et progressistes. 2

Il faut dire qu'un tel classement est une excellente fenêtre sur les systèmes éducatifs étrangers.

I) Classer pour comparer

La raison pour laquelle le classement fait tant parler de lui en France est simple : les résultats ne sont pas bons. Sur les 65 pays évalués en 2009, la France termine 22ème en compréhension de l'écrit, 22ème en culture mathématique, et 27ème en culture scientifique.

La France termine 17ème exæquo avec l'Irlande, les scores étant évalués sur 600.

Dès la parution de ce classement, le constat d'échec est dit inévitable, et Education Nationale comme acteurs tiers s'interrogent sur ce qui fait que « ailleurs, on réussit mieux ». Cependant, les différences entre les systèmes n'indiquent pas une direction précise à emprunter pour changer l'école française. En revanche, on sait en général définir ce qui fait le succès d'un pays ou d'un autre.

Une grande majorité d'experts de l'éducation voient ainsi la confiance accordée aux enfants comme l'atout majeur du système finlandais, vu à travers le classement comme le meilleur d'Europe.

(Extrait de notre entretien avec Hubert Montagner, ancien directeur de recherche de l'INSERM, spécialiste de la chronobiologie)

Et c'est ce même classement qui a mis fin à la vision séduisante et novatrice du système allemand, dans lequel les après-midi sont réservés aux activités culturelles et sportives. Il fut en effet un temps, précédant la conférence nationale, où le ministre Luc Chatel avait envisagé d'adopter ce modèle 3, mais malgré une remontée depuis 2000, l'Allemagne ne peut convaincre au même que les pays scandinaves 4.

On ne peut dès lors qu'être interpellé par le fait que la majeure partie de la discussion autour des résultats renvoie avant tout au problème des rythmes scolaires.

II) Les rythmes scolaires, la clé de la réussite ?

Après une semaine de 4 jours difficile à avaler en 2008, les rythmes scolaires forment un point de débat central de l'école française. Le classement PISA publié deux ans après révèle à ce titre de nombreuses différences entre les rythmes français et ceux à l'étranger :

[En référence à l'Allemagne]
Rythme des journées: source d'inspiration du gouvernement français, le système scolaire outre-Rhin se caractérise par un rythme plus souple. Les cours débutent entre 7h30 et 8h suivant les "Länder" et finissent entre 13h et 13h30. Les cours durent 45 minutes. Leurs après-midis sont laissés libres pour les devoirs ou les activités extra-scolaires.
Vacances: 11 ou 12 semaines. L'été, elles durent en général six semaines et sont décalées en fonction des différents Länder. Deux semaines sont libérées en automne (Herbstferien), deux ou trois semaines à Noël (Weihnachtsferien), une semaine à Pâques (Osterferien), et les jours fériés. 5

[En référence à la Finlande]
Nombre de jours de cours par an : 190. Les enfants finlandais détiennent le record du minimum d'heures de cours dans l'OCDE ... ce qui ne les empêche pas d'être considérés comme les plus performants d'Europe.
Rythme des journées: Du lundi au vendredi, leur journée commence à 8h et se finit à 13h, 14h, ou 15h exceptionnellement en cas d'option. Les cours durent 45 minutes et les récréations 15 minutes. Quant à la pause déjeuner, elle est de 30 minutes.
Vacances: Les vacances d'été commencent fin mai et se terminent vers la mi-août (entre 10 et 11 semaines) Et pendant l'année, les élèves se reposent, en dehors des fêtes légales, quelques jours fin octobre, deux semaines à Noël, une semaine fin février, et quatre jours à Pâques. 5

Différences singulières avec le système français qui ont tôt fait d'être notées. En réalité, et malgré les régressions du budget annuel consacré à l'éducation (cf notre article sur le tiers-temps), les chiffres de l'OCDE montre que par rapport à ses partenaires européens, la France consacre une part similaire de son budget à l'éducation 6. Dès lors, c'est dans l'utilisation de ces moyens, c'est-à-dire l'organisation de l'école, que réside la problème. Cependant, le cas de la Finlande vient ici mettre en échec la responsabilité unique des rythmes scolaires en tant qu'organisation temporelle de l'école : un des atouts de la Finlande serait également l'utilisation judicieuse de ses moyens :

Dire que l’on peut réussir beaucoup mieux avec les mêmes moyens, n’est pas un discours généralement bien accueilli par les syndicats. La Finlande nous démontre pourtant que c’est possible. Elle a fait le choix de concentrer les dépenses d’éducation sur ce qui est vraiment au service des élèves - des taux d’encadrement élevés, des conditions matérielles optimales - et de faire des économies sur des postes qui nous paraissent incontournables : vie scolaire, inspection, administration (y compris centrale). 7

Très clairement, la pédagogie, et l'organisation « logistique » de l'école ont ici un rôle important à jouer. N'allons cependant pas dire que les rythmes ne sont pas un atout en Finlande : nous renvoyons ici à l'extrait de notre entretien avec Hubert Montagner plus haut. Mais nous ne pouvons pas tout mettre sur le compte des rythmes scolaires.

(Extrait de notre entretien avec Corinne Tapiero, vice-présidente de la PEEP)

Les résultats du classement PISA accablent la France, aux yeux de beaucoup, en pointant du doigt un système inégalitaire et discriminatoire entre les enfants. Mais au sein de la controverse, on a tôt fait de considérer – pas entièrement à tort – que le problème de notre système vient des rythmes, et que les pays tels que la Finlande savent mieux organiser le temps scolaire. En réalité, d'autres se tournent aussi vers ce pays mais avec d'autres constats en tête : nous ne savons peut-être pas utiliser nos moyens pour pratiquer une pédagogie efficace.

Les classements sont indubitablement un élément de remise en cause permanent dans le débat, mais certains précisent qu'il ne faut pas oublier que de ce point de vue, les rythmes ne doivent pas être considérés comme un point de réforme singulier qui agira comme « par miracle » sur les classements.




1 Béatrice Barraud. Enquête PISA : l'APEL s'inquiète des résultats obtenus, consulté le 15 Mai 2011 (lien)
2 Site de l'Union Nationale Lycéenne. PISA 2009 : l'éducation en France vue par l'OCDE, consulté le 15 Mai 2011 (lien)
3 AFP sur le site lefigaro.fr. Ecole : le modèle allemand en question, consulté le 15 Mai 2011 (lien)
4 Site kultur-allemande. L'Allemagne aussi analyse les résultats de PISA, consulté le 15 Mai 2011 (lien)
5 Margherita Nasi, Annabelle Laurent, Daniel Hoffman. Les rythmes scolaires, ça donne quoi ailleurs ?, consulté le 15 Mai 2011 (lien)
6 Regards sur l'éducation 2010 : panorama, consulté le 15 Mai 2011 (lien)
7 Philippe Meirieu. L'éducation en Finlande : les secrets d'une étonnante réussite, consulté le 15 Mai 2011 (lien)

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