François Hollande

Le programme fiscal de François Hollande reprend les propositions de Thomas Piketty, Emmanuel Saez et Camille Landais et Guillaume Saint Jacques. Ressort une vision de la société où les inégalités sociales doivent être combattues. La fiscalité est au service de cette vision de la société. Lorsque le candidat propose de rendre les impôts plus progressifs et de taxer le capital comme le travail, il milite pour plus de justice fiscale c'est-à-dire pour une meilleure répartition des richesses donc pour la réduction des inégalités. La justice fiscale n’est un axe de la réforme proposée. Cette réforme de la fiscalité est au service de trois objectifs [1] : renforcer la compétitivité, la justice fiscale et la dimension environnementale.

Fiscalité des particuliers :

- Création d'une tranche supplémentaire d'IR à 45% pour les revenus supérieurs à 150 000 € par part et d'une tranche à 75% pour les revenus supérieurs à 1 M€ par foyer.

    Objectif : rétablir l’ordre moral

Le candidat dénonce une « richesse indécente » en parlant de ceux gagnant plus d’un million d’euros par an. Ces deux mesures sont le signe que M. Hollande voit dans l’impôt le moyen de réduire les inégalités sociales entre les citoyens, cherchant à contrecarrer l’augmentation des salaires des patrons du CAC 40. Son objectif pour la deuxième mesure n’est pas ici de combler le déficit français : « il n'a pas vocation à rapporter un seul euro au budget de l'Etat […] mais relève d'une forme de patriotisme dont le pays a besoin » [2] . Il affirme de plus : « Ce n'est pas une question de rendement [...] c'est une question de moralisation» [3] . Il s’agit ici non seulement de diminuer les inégalités, mais aussi de réduire les salaires jugés non conformes à la norme, de faire prendre conscience aux plus hauts revenus qu’ils ont aussi le devoir de participer activement au comblement le déficit français. Cette taxe sert donc d’exemple, c’est un outil pour appuyer sa vision de la société «Ce que j'apprécie c'est le talent, le travail, le mérite, tous ceux qui ont réussi à créer et à permettre à la France d'avancer. Ce que je n'accepte pas, c'est la richesse indécente. C'est des rémunérations qui n'ont pas de rapport avec le talent, l'intelligence ou l'effort » [4] .

- Revenir sur les allègements de l'ISF décidés en 2011 en relevant les taux d'imposition des plus gros patrimoines.

    Objectif : plus de justice fiscale grâce à une plus grande progressivité.

Le seuil d’imposition sera maintenu à 1,3 M€. Les taux des réductions d’impôt à l’ISF pour les dons (75 %) et pour les investissements dans les PME (50 %) seront alignés sur ceux valables pour l’impôt sur le revenu (respectivement 66 et 18 %).

- Abaissement à 2000 € par enfant du bénéfice du quotient familial (2300 € aujourd'hui).

      Objectif : plus de justice fiscale           

Cette mesure a pour but de réduire les bénéfices du quotient familial aux foyers les plus aisées, car ce bénéfice est d’autant plus avantageux que les revenus du foyer fiscal sont élevés. Ici apparaît d’une part une volonté de réduire les dépenses de l’état mais aussi de diminuer les avantages fiscaux des plus aisés.

- Fusion, à terme, de l'impôt sur le revenu (IR) et de la CSG, remplacés par un prélèvement simplifié sur le revenu (PSR).

    Objectif : plus de lisibilité, plus d’efficacité

Accompagnée de la réduction des niches fiscales, cela permet de rendre l’impôt plus lisible et plus efficace. De plus, comme la protection sociale est financée par la CSG, en appliquant les mêmes taux à ce nouvel impôt qu’à la CSG, « les budgets de la Sécurité sociale seront totalement garantis: c’est le budget de l’État qui paierait entièrement les conséquences d’une éventuelle réduction de taux du nouvel impôt sur le revenu. » [5]

- Soumettre les revenus du capital au barème progressif de l’impôt sur le revenu, tranche à 45 % comprise.

   Objectif : plus de justice fiscale

Actuellement, le travail est plus taxé que le capital, or ce dernier croît beaucoup plus que le premier, donc le faible taux de taxation du capital est source d’iniquité car certains n’ont que leur travail pour vivre, tandis que d’autres ont plusieurs années de revenus en réserve. De plus, le patrimoine est très concentré : les 10% des Français les plus riches en patrimoine ont collectivement 62% du patrimoine total [5] . C’est pourquoi cette mesure permettrait elle aussi de réduire les inégalités sociales.

- Opposition à la TVA sociale

Cause : inégalitaire

« Elle pèse davantage sur les ménages modestes et non-sens économique car elle ferait peser le rééquilibrage sur la consommation, dans une conjoncture fragile. » [1]

 

Fiscalité des entreprises :

- Fin de l'exonération des heures supplémentaires. 

    Objectif : Diminuer le chômage en favorisant l’embauche

M. Hollande cherche à éviter la « concurrence malsaine entre ceux qui ont un emploi et qui veulent faire des heures supplémentaires, et ceux qui n’ont pas d’emplois et veulent être embauchés. » [6] . Le but évident est de diminuer le chômage en poussant les entreprises à embaucher.

- Mettre en place trois taux d'imposition différents sur les sociétés : 35% pour les grandes, 30% pour les petites et moyennes, 15% pour les très petites.

    Objectif : Favoriser l’innovation et la compétitivité

Cette mesure a pour but de favoriser l’innovation de petites entreprises, d’ « encourager le développement, la création, l’initiative et à apporter le soutien de l’Etat vers des entreprises qui créent de l’emploi et qui développent nos territoires » [7] . Il fait ici appel à la deuxième fonction de l’impôt qui est de favoriser l’innovation, la compétitivité des entreprises françaises, afin d’augmenter la richesse moyenne. Cela dit, cette mesure augmente l’impôt sur les sociétés des plus grandes entreprises, supposant ainsi qu’elles sont suffisamment développées pour qu’une telle taxe n’entrave pas leur capacité d’innovation et qu’elles peuvent ainsi participer davantage au financement du fonctionnement de l’état.

- Limiter l’allègement résultant de la réforme de la taxe professionnelle.

    Objectif : lever des fonds et corrigés des effets pervers de la réforme

Selon M. Hollande, la réforme sur la taxe professionnelle, a eu, certes « des effets positifs sur un certain nombre d’entreprises », mais  « Elle a néanmoins affaibli les recettes de l'Etat de sept milliards d'euros par an » et «  Elle a eu des effets pas forcément souhaitables pour d'autres entreprises » [8] .

 

Divers :

- Appliquer, dans la loi de finances de 2013, une surtaxe de 15 % de l'impôt sur les sociétés acquitté par les banques et les établissements financiers.

   Objectif : lever des fonds et marquer son désaccord avec un système bancaire trop peu contrôlable

- Mise en place d’une contribution écologique européenne (à l’étude)

    Objectif : inciter au respect de l’environnement, défense du principe de pollueur-payeur

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[1] : http://www.journeeseconomie.org/afse2012/index.php?post/2012/04/10/R%C3%A9ponses-de-Fran%C3%A7ois-Hollande

[2] : Source : déclaration lors d’un meeting le 1er mars à Lyon

[3] : Source : déclaration sur RTL le 29 février

[4] : Emission Paroles de candidat

[5] : Source : Pour une révolution fiscale, Camille Landais, Thomas Piketty, Emmanuel Saez

[6] : Source : Parlons de France, 26 septembre 2010

[7] : Source : Discours de présentation du projet, 26 janvier 2012

[8] : Source : Europe 1, 7 mars 2012