Chaque débat sur la fiscalité succède à une proposition de réforme

Grâce à Google Trends, nous avons pu constater que la politique, plus particulièrement les déclarations faites par les hommes politiques sont sources de regain périodique du grand public pour la politique fiscale française.

Impôt sur le revenu :

Force est de constater que les recherches concernant l’impôt sur la fortune ont fortement augmenté en 2009, après la proposition faite par M. Sarkozy de supprimer la première tranche de l’impôt sur le revenu [1] . On distingue aussi un faible pic en 2012 qui correspond à la déclaration de François Hollande de taxer à 75% les revenus de plus d’un million d’euros. Cette mesure ne touchant que les hauts revenus, elle a surtout relancé le débat sur la progressivité du système fiscal français et l’imposition du patrimoine. L’effet d’annonce de cette mesure choc a fonctionné, elle a monopolisé le débat pendant quelques jours. C’est typique pour les questions de fiscalité qui font souvent polémique. Chacun ayant ses valeurs et sa vision de la société, certains défendront l’idée que les salaires supérieurs à un millions sont indécents et ne représentent rien, ce qui ne gênera pas d’autres qui voient en ces hauts revenus la rétribution d’un travail à responsabilité dont dépend la survie d’une entreprise et l’emploi de centaines de personnes. Après chaque annonce, on assiste à un rapide débat où tout le monde finit par camper sur ses positions avant que le thème ne disparaisse des discussions publiques.

Impôt sur la fortune :

Comme pour la TVA sociale, l’impôt sur la fortune a bénéficié de pics d’attention lors des deux campagnes présidentielles. Cependant, la question des taux d’impôt sur les sociétés n’a pas été relayée dans le débat public car les programmes des deux principaux candidats ne différaient pas beaucoup sur ce sujet.

Le débat sur la taxation des hauts revenus a rouvert les polémiques sur l’exil fiscal. En fin de campagne et entre les deux tours, la ruée chez les notaires pour les successions [3] a fait l’objet de diverses publications et reportages [4] notamment aux journaux télévisés. Les reportages sur les Français cherchant à s’installer en Suisse, au Luxembourg ou en Belgique ont aussi foisonné. La question était de savoir si l’exil fiscal était un mythe ou une réalité. Contrairement à Thomas Piketty qui ne croit absolument pas en l’exil fiscal, il semblerait que certain français choisissent quand même cette option. Il semble cependant difficile de déterminer les raisons exactes qui les poussent à partir et notamment, quel est le seuil d’imposition prohibitif.

TVA sociale :

Ce sont les élections législatives de 2007 et les vœux de M. Sarkozy le 31 décembre 2011 qui ont provoqué une explosion des recherches à propos de la TVA sociale. Ce sujet est au centre des débats quelques mois car il a engendré une vive opposition entre la droite, initiatrice de la mesure et la gauche qui y était fermement opposée. Le principe de la TVA sociale consiste à baisser les cotisations salariales payées par les employeurs et en contrepartie, augmenter la TVA. Pour la droite, les bénéfices dus aux gains de compétitivité pour les entreprises compenseraient l’augmentation des prix. Pour la gauche au contraire, cette mesure pénalise trop le pouvoir d’achat des français. Chaque parti défend son modèle de société, on retrouve une droite libérale et une gauche attachée aux mesures sociales.

 

Ainsi, on peut non seulement remarquer que les hommes politiques sont à l’origine de ce regain d’intérêt pour la fiscalité, mais de plus qu’entre ces différentes annonces, l’intérêt du grand public pour ces questions retombe aussi vite qu’il a crû. Ainsi, il semblerait que seuls les hommes politiques soient en mesure de donner de la visibilité aux questions ayant trait à la fiscalité, questions qui sont en général réservées à des spécialistes.

On peut de plus noter que la campagne de M. Hollande, mais aussi la campagne présidentielle dans sa globalité a permis de donner une certaine visibilité aux propositions faites par M. Piketty, puisqu’il en reprend quelques unes, comme la fusion de l’IRPP et de la CSG. Ainsi, Guillaume Saint-Jacques, collaborateur de M. Piketty affirme qu’un des succès du livre et du simulateur fut le fait que  « les propositions [faites dans le livre] ont été reprises en grande partie par François Hollande » [2] . De plus, comme l’affirme M. Saint-Jacques, les chiffres utilisés dans les débats publics, comme lors de l’émission Des Paroles et des Actes « étaient en fait des questions issues du simulateur ».

On peut enfin noter que certaines mesures qui apparaissent en campagne présidentielle sont en général absentes des discussions (par exemple, la contribution climat-énergie proposée par Mme Joly, ou encore la promesse d’Instaurer une taxe sur les nuitées des hôtels de luxe de M. Hollande)  notamment entre les différents acteurs que nous étudions. Il apparaît ainsi que ces campagnes ne sont pas uniquement l’occasion d’intéresser le public à des points de fiscalité en général réservés aux spécialistes, mais va même jusqu’à déposséder ces spécialistes de ces questions, puisqu’elles sortent des limites qu’ils avaient fixé.

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[1] : http://lci.tf1.fr/economie/consommation/2009-02/impot-sur-le-revenu-a-quoi-pense-sarkozy-4877966.html

[2] : Entretien avec M. Saint-Jacques

[3] : http://www.ladepeche.fr/article/2012/04/25/1338871-fiscalite-ruee-chez-les-notaires-pour-les-successions.html

[4] : http://videos.tf1.fr/jt-20h/les-notaires-debordes-a-l-approche-du-second-tour-7189533.html