Entretien avec Caroline Guinot

 Caroline Guinot est chef de projet environnement chez Interprofession Bétail et Viande (INTERBEV) depuis janvier 2013

 Compte rendu 

Éléments clés de l’entretien :
-  INTERBEV travaille à développer une méthode d’investigation scientifique : un  système de mesure du CO2 émis en termes de cycle de vie et une analyse multicritère de l’impact environnemental de l’élevage
- INTERBEV est un interlocuteur privilégié au sein de la sphère politique, qui relaie les résultats de recherches menées dans le secteur bovin, ovin et équin. Du côté des éleveurs, son rôle est de fournir les clés de compréhension des débats qui se jouent autour des étapes de production de la viande, de façon à ce que les producteurs puissent trouver des solutions adaptées ==> Une situation de pont structural ?
- La question des émissions de GES de l’élevage ne se pose pas de façon isolée, comme ça a peut être pu être le cas aux Etats-Unis, où le système ultra-spécialisé permet de les réduire, mais sans prendre en compte les conséquences écologiques autres des feedlots jusqu’à présent. L’analyse multicritères présente l’intérêt pour les éleveurs français de faire valoir des territoires bien intégrés dans le paysage national, qui sans égaler les faibles taux d’émissions des US peuvent mobiliser d’autres facteurs (qualité de l’eau, agro écologie, biodiversité, cercle vertueux de l’élevage)

  • Historique/raison d’être du poste de Caroline Guinot

Controverse et questionnements autour des gaz à effet de serre dans l’agriculture ont émergé avec rapport de la FAO Livestock long shadow de 2006 qui estimait que l’élevage était responsable de 18% de l’émission de GES. Ce rapport a provoqué un branle-bas de combat dans le milieu de l’élevage surtout en France, incompréhension des éleveurs et de la filière viande. Avant, Questions environnementales traitées dans la filière mais surtout autour des nitrates, des intrants et du sanitaire avec la problématique de l’ESB par exemple. Problématique mondiale mise sur le dos des éleveurs.

  •  Rôle d’INTERBEV
  1.  Suivre et engager études de recherches et développements pour affiner méthodologie des calculs des gaz à effet de serre. Au début calculs très grossiers, bilan carbone était calculé en multipliant le nombre de vaches par un forfait carbone moyen. En réalité cela dépend de l’alimentation de la vache, de la gestion de ses déjections etc. Mise au point de la méthode d’analyse du cycle de vie (AVC) : comptabilisation de l’impact tout au long du cycle de vie, de l’achat du soja et de l’exploitation des vaches au paquet. Méthodologie qui venait du monde industrielle au départ, pas adaptée à l’agriculture qui est pleine de cycles biologiques (impacts négatifs mais aussi effets biologiques positifs, recyclage). INTERBEV a cherché à adapter cette méthodologie au monde agricole et à prendre en compte le stockage de carbone parce qu’en France élevage très herbagé. Ainsi, certaines prairies sont uniquement valorisées par l’élevage et qui compensent selon les estimations entre 30 et 50% des GES des ruminants. Prise en compte de l’ensemble du cycle et du stockage de carbone, première étape importante du travail.
  2.  Il faut avoir une analyse multicritère. Si on ne veut réduire que les émissions de méthane sans prendre en compte d’autres critères, INTERBEV explique qu’il faudrait mettre en place un élevage où on ne donne plus d’herbe aux animaux, où on les enferme et ont leur donne des hormones de croissance comme aux US afin de produire beaucoup de viande en peu de temps sans que les animaux émettent de méthane. INTERBEV met en avant que la méthode de calcul qui prend uniquement en compte les émissions de méthane défavorise les systèmes extensifs et bios qu’on trouve en France. Biodiversité et qualité de l’eau à prendre en compte entre autres et à faire reconnaitre dans les instances de la recherche comme l’INRA mais aussi au niveau international (la FAO) en finançant des études avec IDELE (institut de l’élevage) et en diffusant ces résultats dans des groupes de travail nationaux et internationaux.
  3.  Etudes de R&D Sur les leviers d’atténuation des GES mais aussi d’un point de vue global sur les possibilités de minimiser l’impact écologique de l’élevage, il ne faut pas regarder uniquement le carbone. Actuellement mise au point d’un autodiagnostique pour les éleveurs sur un certain nombre de critères pour qu’ils puissent avoir une évaluation environnementale de leur exploitation.
  4.  Travail politique et de communication Parler d’affichage environnemental. Aller voir hommes politiques pour leur faire comprendre qu’en mettant en place un affichage avec la méthode précédente centrée sur le méthane on allait déstabiliser complètement le cheptel herbivore français, favoriser les viandes d’exportation, défavoriser la viande blanche par rapport à la viande rouge par exemple.

==> Différents type de systèmes d’élevage, autant voire plus de marge de progrès à l’intérieur des différents systèmes qu’à changer de système. INTERBEV ne cherche pas à prôner un modèle d’élevage mais doit donner outils et clé de compréhension pour que les éleveurs puissent identifier les bonnes solutions, qu’ils puissent juger de ce qu’ils peuvent faire dans leur contexte. Continuer à expliquer ce qu’est l’élevage en France aux politiques et aux médias.

  •  Rapport avec les éleveurs ? Conseil aux agriculteurs ou représentation ?

INTERBEV = interprofession, regroupe 13 familles professionnels de l’ensemble de la filière. Représente les intérêts de la filière, se mettre d’accord sur des positions et angles d’attaque communs. Mission n’est pas de diffuser directement sur le terrain auprès des agriculteurs, développement agricole n’est pas le but d’INETRBEV mais l’association doit fournir billes techniques ou scientifiques pour les aider à se repérer, à agir.

  •  Types d’élevage et concurrence internationale

En France l’élevage se pratique surtout dans des fermes à taille familiale d’env 50 vaches. Surtout systèmes herbagés, soja très peu utilisé dans l’alimentation des ruminants. Eleveurs en France font beaucoup pour l’écologie et n’en sont pas conscients, en font au quotidien ne serait-ce que par l’élevage à l’herbe. Pour eux écologie = contraintes réglementaires de Paris. Elevage aux US très spécialisé : animaux dans les grandes plaines très extensif et à un certains stade rassemblés pour l’engraissement final 80-90% dans les feedlots. Spécialisation partagée entre naisseurs et engraisseurs en France mais pas de feedlots. Les US poussent cette spécialisation à l’extrême. US super bien placés si on ne prend en compte que le carbone. Aux US sanctuarisation de certains espaces et ultra industrialisation dans d’autres, pas en France. Si un jour il y avait taxe carbone sur la viande ou que ça devenait un argument marketing ça serait top pour les US mais pas pour la France. Performance éco et env peuvent être compatibles, difficiles quand il y a des règles très strictes qui sanctuarisent certains territoires et peuvent nuire à la productivité. Accord bilatéraux dans le cadre de l’OMC, UE ouvre contingent à des viandes en provenance des US et du Canada qui sont moins chères et ne répondent pas du tout aux normes ce qui pose problème à la filière française.

  •  Relations d’INTERBEV avec la sphère publique et politique

Politiques parlementaire certains de territoire ruraux donc vrai écoute,. Ils savent que sans élevage les territoires perdent des ressources économiques et une identité culturelle forte eu demeurant (gastronomie, paysages etc.) Très bonne écoute de la plupart des Parlementaires et bon dialogue. Journaliste ont du mal à reprendre les éléments d’INTERBEV reprennent souvent éléments de contradiction, ne présentent pas une vision équilibrée. Plutôt du côté vindicatif, c’est aussi un effet de mode. Travail avec l’UE : c’est plus les fédérations qui représentent les éleveurs et composent INTERBEV mais pas INTERBEV.

  •  Avantages écologiques de l’élevage, atouts

- Le lien au sol grâce à l’élevage d’herbivores tel qu’il est pratiqué en France (bovins, ovins, équins pas volaille et porc chez INTERBEV), surfaces qui permettent de recycler les déjections ==> cycle vertueux prôné par S. Le Foll dans son plan d’écologie. Pas d’exportations de déjection.
- Large présence de l’herbe dans les élevages qui ont plein de caractéristiques positives. Filtre l’eau, empêche érosion, stocke carbone, refuge pour les pollinisateur. Infrastructure agroécologique. Haies ont aussi un rôle écologique.
- Ensemble des services rendus aux territoires. occupation de l’espace, entretien des paysages, des sentiers de randonnée. Economiques et sociaux : fournit des emplois.

  •  La viande et les consommateurs

Impact de l’inquiétude écologique sur la consommation de viande. Baromètre en 2010. Mesure entre 2007 et 2010 comment les citoyens percevaient l’élevage bovin et son impact sur l’environnement. En 2007 13% d’opinions négatives, en 2010 30 ou 40%, ce lien a  imprimé les esprits. En terme de consommation ce n’est pas le principal facteur de baisse. Selon les marketeurs avant viande rouge était très valorisée maintenant comme ça coûte plus cher et qu’ils y a beaucoup d’arguments contre ils s’en détournent plus facilement. Croissance des mouvements végétariens, image de la viande tellement dégradée que les municipalités et institutions en sont à prôner des repas sans viande rouge. Forte demande des consommateurs pour connaitre l’origine de la viande. Dans les produits transformés l’industriel n’est pas obligé de dire d’où vient la viande. Objectif du Label « Viandes de France » lancé récemment (11 février) et qui qualifie origine d’animaux nés, élevés et abattus en France est de répondre à cette demande.

Verbatim de l’entretien Plus

 Présentation du projet par les élèves, « nous avons vu qu’INTERBEV était un acteur qui revenait souvent sur le sujet et donc on a eu envie de vous rencontrer pour savoir quel était votre rôle en tant que chargée de projet environnement au sein d’INTERBEV mais aussi dans vos relations que vous avez avec les différents acteurs du débat. »

Caroline Guinot : « Je vais peut-être faire un peu d’historique parce que vous avez dû voir que la controverse et les questionnements autour des gaz à effet de serre ont émergé avec rapport de la FAO Livestock long shadow de 2006 qui estimait que l’élevage était responsable de 18% de l’émission de GES. Ça en fait c’était le communiqué de presse qui a été reprise largement depuis et à ce moment-là branle-bas de combat dans le milieu de l’élevage dans le monde et notamment en France avec l’incompréhension des éleveurs et de la filière viande et c’est là qu’ils ont créé mon poste de chargée de projet environnement sachant que jusqu’alors les questions environnementales était traitées dans la filière mais surtout autour des nitrates, justement il y a eu toutes les mises aux normes des exploitations, et puis il y a eu des questions autour du sanitaire avec l’ESB et en fait la question des gaz à effet de serre est arrivée un peu comme un pavé dans la mare par les éleveurs qui en gros sont vraiment au niveau du local, de leur territoire et tout d’un coup on leur mettait sur le dos une problématique mondiale qu’ils ne comprenaient pas forcément.

Donc en fait moi je suis chez INTERBEV depuis 2013 et notre rôle, notre position c’est déjà de suivre et d’engager des études de recherche et de développement pour déjà achever les méthodologies de calcul des gaz à effet de serre car au début les calculs étaient très grossiers. Le bilan carbone c’était on multiplie une vache par un forfait carbone et puis voilà ça donne la quantité de gaz à effet de serre émis alors qu’en fait tout ça ça dépend de l’alimentation de la vache, de la façon dont on gère ses déjections etc. Donc il fallait achever ces méthodologies-là qui sont les méthodologies d’analyse du cycle de vie (AVC) je ne sais pas si ça vous parle ça.

Justement c’était une des questions qu’on se posait, la façon de mesurer

Eh ben voilà, c’est la comptabilisation des émissions pour des ressources utilisées tout au long de la vie d’un produit donc par exemple pour une vache, donc pour un morceau de viande, ça va de l’achat de soja, même si c’est très peu dans l’alimentation des herbivores, jusqu’au au paquet dans les rayons du supermarché. Donc on a une idée des émissions à chaque étape. Cette méthodologie elle venait du monde industriel, elle était pas du tout adaptée à l’exploitation agricole parce que l’exploitation agricole c’est un cycle biologique, il y a des choses qui rentrent et des choses qui sortent mais aussi du recyclage à l’intérieur, les déjections des animaux sont réutilisées en engrais, enfin bon. Donc notre premier travail ça a été d’adapter ces méthodologies-là au monde agricole et notamment c’était important de prendre en compte le stockage de carbone parce qu’en France on a un élevage très herbagé. On a 80 000 hectares de prairies, ces praires-là elles sont uniquement valorisées par l’élevage et elles compensent selon les estimations entre 30 et 50% des GES de l’élevage de ruminants. Donc ça c’était un point important, le premier point prise en compte du cycle notamment le stockage de carbone.

Deuxième point très important pour nous : le multicritère parce que ce qu’on explique aux médias, ce qu’on explique aux scientifiques qui ne sont pas forcément au courant de l’élevage c’est que avec une comptabilisation uniquement du carbone si on ne veut réduire que les émissions sans prendre en compte d’autres critères, on donne plus d’herbe aux animaux, on les enferme et ont leur donne des hormones comme aux Etats-Unis comme ça on produit beaucoup de viande en peu de temps, pendant ce temps ils émettent pas de méthane et on a des scores d’émissions par kilo de viande bien inférieur qu’avec le système bio et extensif. Par exemple on a notre position avec la filière bio pour expliquer que cette méthode pouvait défavoriser les systèmes extensifs. Du coup ce qui est important pour nous c’est de mettre en avant d’autres critères comme la biodiversité par exemple ou la qualité de l’eau parce qu’on sait que dans les zones où il y a de l’élevage et de l’eau eh bien il n’y a pas de problème de qualité de l’eau, l’herbe filtre l’eau etc. Donc voilà on avait ces critères-là à faire reconnaitre et alors où est-ce qu’on a été les faire reconnaitre ? dans plusieurs instances, les instances de la recherche c’est-à-dire l’INRA mais aussi au niveau international, la FAO c’est-à-dire en finançant des études avec l’institut de l’élevage qui est un peu notre organisme spécialisé et en diffusant ces résultats là en participant aux groupes de travail nationaux et internationaux pour échanger et montrer quels étaient aussi nos données. Il y a eu ce premier travail là après il y a eu un travail politique c’est à dire d’aller voir… vous avez du entendre parler de l’affichage environnemental…

Oui

C.G : donc ça c’est un peu lié, en fait c’est complètement lié parce que la méthode de l’affichage environnemental c’est exactement celle dont je vous parlais donc tout l’enjeu ça a été d’aller voir les parlementaires pour leur faire comprendre que mettre en place un affichage environnemental avec cette méthode-là conduirait à déstabiliser complètement le cheptel herbivore français et à favoriser les viandes d’importation par rapport aux viandes françaises ou de favoriser la viande blanche par rapport à la viande rouge. Donc ces mêmes éléments-là, le stockage de carbone, le multicritère on les a portés aussi aux politiques.

Et troisième volet : on les a aussi porté auprès des ONG en organisant des concertations avec les principales ONG de conservation de l’environnement c’est-à-dire WWF, France Nature Environnement et Agronomes et Vétérinaires sans frontières. En fait on s’est réunis pour partager ces éléments-là sachant que eux sont tout à fait en phase avec notre point de vue sur l’utilisation auprès des consommateurs de ces méthodes qui sont très simplistes.

Donc en France ça a été les trois volets de notre action donc technique, politique et partie prenante dans les discussions avec les ONG.

Alors après on n’est pas que sur le défensif on essaye de réfléchir aussi sur les leviers de  réduction des émissions de gaz à effet de serre et on les regarde jamais tous seuls, on n’est pas là à regarder un système d’exploitation en disant bon ben si on met du lin dans la ration c’est bien on regarde l’ensemble, si ça ne nuit pas à la qualité de l’eau, si ça ne nuit pas aux résultats économiques de l’exploitation, à la qualité du  nutritionnelle, ‘fin tout ça auquel il faut faire avec. Pour nous, regarder uniquement le carbone c’est complètement contreproductif. Et donc ça on mène des études de R&D et en gros au bout de cinq ans on est en train de travailler à un auto diagnostique pour les éleveurs, pour qu’ils puissent s’évaluer sur un certain nombre de critères (qualité de l’air, qualité de l’eau, biodiversités, performances économiques..). Donc voilà pour qu’ils aient une vision de l’impact environnemental de leur exploitation.

Vous êtes plutôt dans le conseil aux agriculteurs, ou plutôt en tant que représentants

J’aurais dû commencer par là. Interbev en fait c’est une interprofession, en gros cinq familles de professionnels [de tous les secteurs de la production], des agriculteurs, au conditionnement, en passant par les abattoirs, qui se réunissent pour se mettre d’accord sur un certain nombre de points. Notre mission c’est pas d’aller directement sur le terrain auprès des agriculteurs, […] pour aider les producteurs, les (techniciens ?) à se repérer sur le secteur, sur l’alimentation, (sur quoi on peut les défendre ?)

[…] Ca les rassure un peu. Ca c’est pour résumer un peu, mais je peux vous envoyer un article que j’ai fait avec un sociologue sur les controverses.

Je voudrais juste rappeler quelques éléments sur l’élevage et l’environnement. Donc déjà, on n’a pas d’élevage hors sol, 90% de l’alimentation est produite sur l’exploitation, on a surtout des systèmes herbagés. Après en termes d’alimentation, on a 90% d’herbe dont chez les bovins viandes, finalement le soja, la part importée, ça représente 0,8% de mémoire.

Parce que ça justement le soja dans les études américaines c’est un sujet qui revient souvent.

 

Parce qu’en fait oui, le soja, [Quand on comptabilise les émissions dues à la production] ça prend en compte la déforestation. C’est pour ça que ça pèse très lourd

Et du coup la France est très peu concernée finalement

 

Elle est concernée parce qu’elle pourrait gagner en autonomie, mais le soja il n’est pas importé principalement pour les ruminants. Les ruminants ils en consomment, au total hein, je parle des vaches laitières, des […], consomment 20% du soja importé.

Et justement par rapport à ça en termes de méthode d’élevage, la France a l’air assez différente. Est-ce que c’est un système d’élevage qui est assez typique au pays, ou alors qui est adopté dans d’autres endroits en Europe

 

En fait, notre caractéristique, c’est d’avoir des fermes familiales, enfin de taille familiale, des cousins et tout ça, la moyenne c’est 50 vaches, ça grossit hein, ça grossit un peu, c’est normal, la modernisation, la nécessité […]. Et ensuite, aux Etats-Unis c’est très spécialisé, c’est à dire que ils élèvent les animaux dans les Rocheuses, les grands espaces, et ensuite on les rassemble dans les feedlots, parce qu’en fait l’alimentation des animaux elle n’est pas la même quand ils sont en phase de croissance, on les engraisse à la fin, parce qu’à la fin il faut leur donner plus de gras, pour que la viande soit bonne, juteuse. Dans les Rocheuses, ils sont à 80/90% en blé. […]

En France, même si on a quand même des régions d’engraisseurs, dans le Massif central par exemple, on en a d’autres qui sont plutôt céréalières, parce que c’est là où il y a des céréales, c’est là où il y a des bons produits dans tout ce qui est agroalimentaire, par exemple la poudre de betterave, c’est un résidu du sucre, mais c’est très bon pour nourrir les bovins. Ca c’est un peu spécialisé comme ça. Donc en montagne, j’ai un schéma sous la main parce que je suis en train de travailler [….] donc en montagne on va surtout sur du massif, beaucoup d’herbe, les surfaces ne sont pas labourables, on peut rien faire d’autre que de l’élevage, donc il y a de l’herbe, par contre on n’a pas de céréales pour les engraisser. Donc là les brouteurs, c’est à dire les jeunes males, partent dans les exploitations d’engraissement plutôt en plaine, donc là il y a des surfaces de céréale notamment et aussi des coproduit. Et au milieu dans les piémonts, il y a des surfaces labourables et des surfaces non labourables, on va pouvoir cultiver les céréales, donc naisseurs et engraisseurs, ils engraissent tous les bovins quasiment.

Donc voilà, par contre nos engraisseurs, ils ont des tailles, euh 400 mètres, et pas 200 000

Donc finalement les Etats-Unis c’est un peu comme s’ils avaient poussé à bout un dynamique.

 

Oui exactement. Et eux en fait ils ont un processus très industriel d’abattage, très calibré, ils ont besoin d’avoir toujours les mêmes carcasses, toujours aussi, ils ont des règles très inférieures aux nôtres. Par exemple nous, à l’abattoir les bovins ils peuvent pas arriver s’ils sont sales, il y a des grilles, parce qu’ils sont souillés par les déjections, ils arrivent […], donc nous il y a des règles très strictes, aux Etats-Unis ils arrivent à l’abattoir ils sont dégueulasses, là pour les nettoyer ils leur passe de l’acide lactique, alors que nous c’est pas le cas en France, on les nettoie avant. Voilà, il y a des distorsions de concurrence comme ça, au niveau sanitaire, on n’a pas le droit d’utiliser d’hormones de croissance, alors qu’aux Etats-Unis les hormones de croissances sont autorisés comme ça ils engraissent plus vite […] et euh en fait si on prend le bilan carbone, ils sont super bien placés. Nous, on est plutôt performants, il y a un rapport de la FAO, il faudrait que je vous l’envoie, qui est sorti dernièrement, et là on voit que par unité de protéine l’Europe se positionne parmi les meilleurs, mais tout en gardant des tailles d’exploitation [raisonnables].

[…] Nous on ne sanctuarise pas les espaces par exemple, aux Etats-Unis il y a des espaces naturels et des gros espaces qui sont hyper-industriels. En France, vous avez vu le paysage, quasiment tout le temps cultivé ou entretenu, et donc la nature, la nature et l’agriculture [sont mêlés], ça nous éloigne un peu des gaz à effet de serre mais tout ça pour dire que c’est un critère qui pourrait avoir des conséquences, sur la taxe carbone par exemple, les Etats-Unis vont super bien s’en sortir et envahir le marché.

Et justement par rapport à la concurrence des pays étrangers, la France du fait de sa structure est ce qu’elle pâtît de la concurrence

Elle le fait valoir au travers [de label], il y a eu le lancement du label Viande de France qui certifie l’origine française, […] donc on a ce type de démarche. Après c’est compliqué parce qu’en Europe, on n’a pas le droit de faire de la concurrence, par exemple quand il y a un appel d’offre de cantine on n’a pas le droit de spécifier qu’on veut de la viande d’origine française, on ne peut pas favoriser un pays par rapport à l’autre.  Après en Europe c’est un peu compliqué même si les élevages européens sont assez homogènes, enfin il y a des systèmes qui sont encore plus à l’herbe que nous, et après il y a des systèmes plus intensifs type Hollande, vaches laitières en Allemagne, et là ils vont essentiellement… il faut savoir qu’en France on a la moitié du cheptel laitier, et la moitié du cheptel de race à viande [explication de ce qu’est le cheptel laitier et cheptel races à viande]