Scientifiques

Il ne nous semble pas pertinent de vous présenter les écrits scientifiques dans une unique catégorie prétendument homogène, puisque d’une part ils ne se sont pas prononcés de façon uniforme et que d’autre part ils l’ont fait avec différentes méthodes. C’est pourquoi nous avons fait le choix de les présenter selon la méthode utilisée, considérant que celle-ci atteste de leur approche de la controverse sur l’écotaxe. Par ailleurs, nous observons que l’économie et la sociologie sont les deux champs scientifiques ayant le plus investi la question de l’écotaxe.

Démarche quantitative

On parle de méthode quantitative lorsqu’une démarche scientifique se fonde sur des outils d’analyse mathématiques ou statistiques. Il s’agit de former des instruments conceptuels sous la forme de variables observables et mesurables, en ayant notamment recours à des questionnaires et des enquêtes. Les résultats de ce type de recherche sont par conséquent souvent présentés sous la forme de tableaux et de graphiques. Les scientifiques recourant à des données quantitatives se concentrent donc sur une partie du problème qu’ils éclairent via des données empiriques chiffrées.

La méthode quantitative est classiquement utilisée en économie, ainsi que dans les sciences dites « dures » comme la physique ou la biologie. Elle provoque cependant un débat au sein des sciences sociales, comme la sociologie ou l’anthropologie. Un des arguments majeur contre l’utilisation d’une démarche quantitative en sciences sociales est l’idée qu’elle introduit un biais, dans la mesure où les hypothèses à la base de la construction statistique pourraient déformer les faits de sorte à ce qu’ils concordent artificiellement à la théorie que l’on cherche à démontrer.

Des économistes comme P.-V. Harnay et P. Rème ont fondé leur analyse de l’efficacité de l’écotaxe sur un comparatif du projet de l’écotaxe Jospin aux écotaxes européennes effectivement en place.

Démarche qualitative

La méthode dite qualitative vise à dresser un tableau descriptif d’un sujet, qui en relate. Le chercheur est dans ce cadre le principal instrument de collecte de données et va avoir recours à diverses stratégies : les entretiens, la démarche ethnographique, « l’observation participante » ou encore de la recherche dans les archives.

La démarche qualitative induit donc un raisonnement extrêmement subjectif, dans la mesure où les chercheurs sont souvent menés à s’immerger personnellement dans le milieu enquêté. Cette méthode est aujourd’hui majoritairement utilisée en sciences sociales, même si certains critiquent son manque de scientificité. Se développent également des courants en économie fondés sur ce type de recherche, notamment en économie comportementale.

Des sociologues, à l’instar de M. Ollivier-Trigalo, sont ainsi partis d’un travail de terrain afin d’analyser les problèmes d’acceptabilité politique qu’elle soulève. Alors que la méthode quantitative mettait l’accent sur l’effectivité de l’écotaxe, la méthode qualitative met ici en lumière les limites de cet outil, intrinsèquement liées à la méthode de mise en place.

Démarche théorique

Des économistes B. Perret ou J.-C. Hourcade partent de présupposés théoriques : ils placent la protection de l’environnement comme devant être la préoccupation principale de nos sociétés contemporaines. C’est sur cette hypothèse forte qu’est fondée leur défense de l’écotaxe.

Modélisation

Certains scientifiques ont une approche plus abstraite du sujet. Ils proposent des modèles théoriques de l’écotaxe. Un modèle économique consiste en une représentation simplifiée du système économique. Il est construit pour étudier et prévoir le fonctionnement d’un secteur d’activité ou d’un groupe d’agents économiques. Il se fonde sur un formalisme mathématique et se présente comme un système d’équations ou de diagrammes. L’intérêt d’un modèle économique est qu’il permet de lister et de mesurer les effets des différentes variables qui interviennent dans le mécanisme économique. Les modèles qui correspondent à un degré d’abstraction élevé, permettent de faire des prévisions ou des simulations, fécondes pour appréhender la réalité. Néanmoins les modèles économiques présentent des limites : il s’agit d’approximations du monde réel fondées sur des hypothèses parfois trop simplificatrices, les conséquences que l’on en tire ont donc un caractère incertain.

Des économistes comme E. Calthrop, B. De Borger et S. Proost sont ainsi partis d’un modèle d’équilibre général pour simuler les effets d’une écotaxe afin d’en tester l’efficacité. Ils partent donc d’un modèle théorique pour tester l’impact qu’une écotaxe aurait sur l’économie globale d’un pays. D’autres comme Koopman et Gert ont utilisé dans leur article une modélisation visant à comparer la taxe à d’autres outils potentiels comme le marché des émissions.