Le droit à l’oubli ayant déjà été beaucoup discuté, il existe certaines solutions pour redevenir anonyme, ou du moins empêcher un accès trop facile à certaines données.

La première issue est bien sûr la prévention des utilisateurs, en les mettant au courant du fait que leurs données et actions sur le web peuvent être répertoriées et utilisées. Par exemple, vous avez pu remarquer qu’un grand nombre de sites internet affichent, lors de votre première visite, un bandeau vous indiquant qu’en poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation des « cookies » émis par le site en question. (D’après la CNIL, Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés, les cookies, aussi appelés traceurs, sont des fichiers textes implantés sur votre ordinateur lors de votre connexion au site et permettant de recueillir vos données de navigation, qui peuvent servir à faire de la publicité ciblée par exemple [1SIa]). La Loi Informatique et Libertés (rappelée en décembre 2013 par une recommandation de la CNIL [1SIb]) indique ainsi que l’utilisation de tout système visant à recueillir les données des internautes (comme les cookies) est soumis à un consentement préalable de l’utilisateur, qui doit donc être demandé par le site qui utilise cette méthode.

Une deuxième solution consiste simplement à demander à Google de déréférencer les pages que l’on ne veut plus voir apparaître lorsque l’on tape certains mots-clés. En effet, depuis la fin du mois de mai 2014 et suite à un arrêt de la CJUE (Cour de Justice de l’Union Européenne), Google propose un formulaire de droit à l’oubli, permettant aux internautes de faire cette demande (formulaire que vous pouvez retrouver ici) [10P]. Ce formulaire a l’avantage d’être rapide et gratuit [8P]. Il suffit de renseigner son nom, son prénom, une adresse e-mail, l’adresse de la page que l’on veut déréférencer, de joindre une photocopie d’une pièce d’identité, et bien sûr il faut expliquer les raisons de cette demande. Cependant les requêtes sont traitées au cas par cas par le groupe Google lui-même, et ne sont pas toujours acceptées car elles doivent correspondre à certains critères. Il faut par exemple que l’information soit réellement obsolète, mensongère ou très ancienne (et jugée comme telle par les services de Google). Une information jugée d’utilité publique aura beaucoup moins de chances d’être enlevée. Comme l’explique Benoît Tabaka, « Google apprécie la demande au regard du contexte du moment donné [2E]. »

D’autres technologies, plus sophistiquées, sont aussi disponibles, notamment pour la protection sur les réseaux sociaux, dans le but de ne pas divulguer ses informations personnelles à tout le monde. Dans leur article « Realizing the Right to Be Forgotten in an SNS Environment » [1S], les auteurs citent par exemple « User Privacy Policy » qui permet à l’utilisateur d’instaurer une politique de confidentialité sur ses informations, « Dual Watermaking Scheme » qui prévient le concerné par l’information que celle-ci va être utilisée, et il peut alors en refuser l’accès, et « FaceCloak », qui montre un faux profil aux personnes tierces inconnues. Il est également possible de combiner ces technologies pour apparaître anonymement et protéger ses données de manière plus complète.

Enfin, Benjamin Nguyen nous a fait savoir, lors de notre entretien avec lui [1E], que lorsque l’on crée un site web, il est possible d’utiliser un protocole d’exclusion de robots, « robot.txt »[2SI], qui permet de demander aux robots crawleurs (référençant l’information sur le web) le non-référencement ou la non-utilisation des données sur une page. Il s’agit simplement d’un fichier texte, placé à la racine d’un site web par le programmeur, mais cela constitue seulement un message respecté ou non par les services du web, ce n’est pas une véritable protection.


[8P] F. Michel, « Dérive sur le droit à l’oubli numérique : un pianiste tente de faire retirer une mauvaise critique du Washington Post grâce à la législation européenne », Atlantico, 5 novembre 2014.

[10P] S. Dreyfus, « La présidente de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) se réjouit de la décision européenne imposant un droit à l’oubli numérique, nouvelle arme à disposition des citoyens », La Croix, n°39983, page 11, 12 septembre 2014.

[1S] Cheol Ho Sin, Nam A. Kim, Byeong Woo Go, « Realizing the Right to Be Forgotten in an SNS Environment », Advances in Computer Science and its Applications, Lecture Notes in Electrical Engineering, volume 279, pages 1443-1449, 2014.

[1E] Entretien avec Benjamin Nguyen, informaticien et professeur à l’INRIA, 19 janvier 2015. 

[2E] Entretien avec Benoît Tabaka, Directeur des politiques publiques de Google France, 22 janvier 2015.

[1SIa] Les cookies – CNIL – Commission nationale de l’informatique et des libertés

http://www.cnil.fr/vos-droits/vos-traces/les-cookies/ (consultée le

[1SIb] Délibération n° 2013-378 du 5 décembre 2013 portant adoption d’une recommandation relative aux Cookies et aux autres… – CNIL – Commission nationale de l’informatique et des libertés

http://www.cnil.fr/documentation/deliberations/deliberation/delib/300/

[2SI] Robots.txt – Manuel d’implémentation http://robots-txt.com/