Aide à la recherche ou aide à l’industrie?

Le CIR est-il est une aide à l’industrie qui ne dit pas son nom ?

 

Sciences en Marche (SeM) et Brigitte Gonthier-Maurin dénoncent un détournement de l’objectif initial du CIR. Les premiers soulèvent le problème de la substitution des montants accordés par le CIR c’est-à-dire que pour 1€ de CIR versé, l’investissement supplémentaire en R&D fait par l’entreprise est inférieur à 1€. L’investissement qu’elle réalise est ainsi diminué et substitué par le crédit d’impôt. L’effet recherché est à minima celui d’addition (1€ de CIR, 1€ supplémentaire investi).

 

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D’après la Figure 1, l’année 2012 marque le retour de l’effet d’addition mettant fin à 5 années de substitution des investissements de R&D. Le montant substitué est l’aire entre les deux courbes soit 4,5 milliards d’euros. Ainsi, cette somme n’a pas servi à accroître les dépenses de recherche mais a été absorbée par les entreprises, d’où l’accusation d’une aide à l’industrie et non à la recherche.

Sciences en Marche se rapporte également à l’évolution de l’emploi de personnel R&D pour démontrer que le CIR a une influence négligeable sur le développement de la recherche.

 

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La Figure 2 ne montre pas de corrélation particulière entre l’augmentation graduelle du montant du CIR et le nombre d’emplois nouveaux en R&D. Les auteurs du rapport ont également observé la croissance de la création de ces postes (en employé/an). Ils remarquent qu’elle n’est pas influencée par la réforme de 2008 démontrant ainsi que l’explosion du coût du CIR n’a pas permis un développement de la R&D mais plutôt un soutien aux entreprises.

Cependant, le MENESR, Franck Debauge et la DGRI (Direction Générale de la Recherche et de l’Innovation) dénoncent ces statistiques effectuées sur des données non représentatives et n’incluant aucun scénario contrefactuel (permettant d’isoler une cause). Il est notamment intéressant d’observer que la crise de 2008 n’influence aucune des deux grandeurs représentées.

Le rapport au Sénat par M. Berson,  Rapport d’information fait au nom de la commission des finances sur le crédit d’impôt recherche (CIR) (2012),  relate que le CIR remplirait une fonction annexe différente chez les petits et grands groupes. Pour les PME, il permettrait de compenser un système de financement bancaire défaillant, ce qui, d’après la sénatrice Brigitte Gonthier-Maurin, n’est pas son rôle. Pour les grands groupes, il empêcherait la délocalisation des recherches. La sénatrice s’oppose à cette conclusion car le premier facteur influençant le choix de localisation d’une activité de recherche serait la qualification du personnel. Elle soutient cependant que des actions de lobbying et de chantage à la délocalisation ont pu être menées par certaines multinationales. Dans le cas de la multinationale Sanofi, c’est ainsi que le ministre de l’économie Emmanuel Macron affirme dans une interview en 2015, que « Si on ne mettait pas ce CIR cette entreprise aurait mis sa recherche hors de France » (Un Montpelliérain au patron de Sanofi : « 24 000 € par jour, mon salaire annuel », Midi-Libre, 04/03/2015).