Devons-nous craindre des dérives ?

Si le débat porte fréquemment sur la suffisance ou l’absence de contre-pouvoirs assez forts, cette loi encadrant le travail des services de renseignement est également sujette au débat des potentielles dérives qu’elle pourrait engendrer. L’exemple des services de renseignement américains en sont un exemple et une source d’alimentation de cette crainte.

Le regroupement d’acteurs du numérique Ni Pigeons Ni Espions créé pour faire signer une pétition contre le projet de loi avance sur son site internet que « Mettre Internet massivement sous surveillance, c’est ouvrir la porte à un espionnage incontrôlable, sans aucune garantie de résultat pour notre sécurité. ». Cette phrase résume la majorité des positions se liguant à l’encontre de la loi. Certaines associations militantes  et ONG déplorent ainsi d’être surveillées, comme Droit au Logement ou Amnesty International.

Ce désaccord a été d’autant plus accru que l’état d’urgence décrété après les attentats de novembre a été utilisé à d’autres fins que la lutte contre le terrorisme islamiste. Des perquisitions menées chez des personnes appartenant au parti politique Europe-Ecologie-Les-Verts ou de simples propriétaires d’une ferme bio juste après l’institution de l’état d’urgence et en amont de la COP21. Les raisons développées par ces dernières sont leur appartenance à des mouvances contestataires et associations militantes. La récente deuxième prolongation de l’état d’urgence voire une troisième prochainement pourrait alors impliquer une instauration durable d’un tel dispositif, qui pourtant n’est pas directement corrélé avec le nouveau projet de loi : l’état d’urgence n’est qu’une mesure d’exception pour une durée déterminée.

Ajoutons à cela une certaine urgence à faire voter la loi dans une absence de débat public que beaucoup de ses détracteurs ont jugé inquiétante. En effet, la procédure a été accélérée suite aux attentats de janvier 2015. Certains points n’ont pas forcément pu être abordés pleinement et certaines formulations pourraient être interprétées différemment.

Toutefois, les  défenseurs de cette loi contrecarrent ce point de vue en avançant le but premier de cette loi : fixer un cadre juridique nécessaire qui viendrait remplacer les responsabilités et encadrements désuets des services de renseignement datant de 1991. C’est dans cette optique des hommes politique de tout bord, Alain Juppé comme Jean-Jacques Urvoas, ont pu défendre la loi renseignement. De plus, l’argument d’un contournement possible du texte pourrait être généralisé à tout type de lois françaises : l’Etat français peut alors potentiellement passer outre n’importe quelle loi entérinée. Cette logique est entre autre défendue par un expert en intelligence artificielle qui explique que :

« « Le gouvernement va passer outre » revient à ne pas avoir de loi ! Dans des cas exceptionnels, oui, tout ça peut être contrôlé. Mais sinon, il ne doit pas y avoir de débordements. »

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