Pollution et intrusion

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L’époque durant laquelle de nombreuses fenêtres « pop-up » apparaissaient  de façon inopinée et incontrôlée durant l’avènement de la publicité est, sinon abolie, du moins plus cadrée. La pollution sur Internet reste néanmoins présente et relativement pesante pour les internautes. La dénomination « pollution et intrusion » fait ici référence aux pratiques de certains annonceurs, qui ont tendance à dégrader l’expérience de navigation.

Pollution, de quoi parle-t-on ?

La pollution et l’intrusion sont corrélées. Tout commence par la pose et la récolte de cookies (1) sur les sites visités, qui enregistrent des données personnelles ainsi que l’historique de navigation. Ces données sont ensuite stockées chez les hébergeurs associés, qui accumulent des bases de données avant de pouvoir les vendre, ou de cibler les personnes associées. L’exemple le plus parlant de ce processus de fonctionnement est le retargeting proposé par Criteo : lorsqu’un internaute effectue une recherche de baignoire, toutes les publicités qui vont lui être proposées dans les jours qui suivent seront également des baignoires, tous supports confondus. Le fonctionnement par comptes (Google, réseaux sociaux, sites de presse, etc.) d’Internet fait en effet de chaque utilisateur / internaute une personne unique aux yeux des annonceurs, qui peut donc être suivie de façon indifférenciée sur ordinateur, tablette, smartphone, etc. La pollution mentionnée ici est essentiellement visuelle et se rapporte au confort de navigation, mais l’ampleur du phénomène ne s’arrête pas là :

« La bande-passante est loin d’être neutre écologiquement parlant (…) et reste polluée par l’activité publicitaire. [En effet,] quand on parle de dématérialisation, on oublie de dire qu’il y a derrière cela des kilomètres de câbles, des ressources rares (métaux, eau) (…)  pour faire tourner des serveurs qui ne servent qu’à stocker de la publicité ».

Entretien avec Thomas Bougenot, chargé de plaidoyer de l’association Résistance à l’Agression Publicitaire (RAP)

L’exemple typique que cite Thomas Bougenot est celui de la consultation d’un article sur un site : des lignes de texte, mises en forme, ne représentent que quelques kilo-octets, tandis que la vidéo que l’internaute est contraint de regarder pour accéder au contenu pèse quelques méga-octets, soit environ 1000 fois plus !

« Il existe donc une pollution réelle, outre celle de lecture, de trafic et d’utilisation de bande-passante ».

Entretien avec Thomas Bougenot, RAP

Au-delà de l’aspect purement écologique de la chose, un questionnement plus approfondi s’amorce sur l’utilisation faite des données personnelles récoltées auprès des internautes.

Quid de l’intrusion ?

On parle ici de l’intrusion dans la vie personnelle des internautes. Les outils numériques et digitaux occupent en effet une part croissante de notre quotidien, ce qui livre d’autant plus d’informations sur notre vie privée.

« Nous sommes tous, vous comme moi, référencés dans des bases de données dont nous n’avons pour la plupart même pas conscience qu’elles existent ».

Entretien avec Thomas Bougenot, RAP

Cette intrusion est d’autant plus vicieuse qu’elle fait miroiter des contenus gratuits, alors même que le leur consommation transforme les utilisateurs en victimes consentantes.

« La publicité est semblable à un impôt déguisé : si j’achète un produit d’une marque, je contribue au financement de la publicité de cette marque. C’est un peu comme la TVA, sauf que dans ce cas le montant de votre participation n’intervient pas sur le ticket de caisse ».

Entretien avec Thomas Bougenot, RAP

L’idée développée consiste à dire que les internautes, victimes consentantes de la situation dans laquelle ils se trouvent, sont de plus complices de  Dans les faits, les contenus proposés ne sont pas tout à fait gratuits. La formule classiquement reprise est la suivante : si c’est gratuit, c’est vous le produit.

« Nous [le RAP] préférons en l’occurrence inverser la formule : si c’est vous le produit, ce n’est pas gratuit ».

Entretien avec Thomas Bougenot, RAP

Il existe beaucoup de sites gratuits, à savoir libres d’accès, comme par exemple les sites gouvernementaux, et l’un des plus consultés au monde : Wikipédia. Ces sites sont accessibles sans restriction, proposent un accès illimité à leur contenu, le tout sans aucune rétribution publicitaire.

 

Par quel point de vue commencer ?

Une défense mise en place par les internautes

Une entrave au modèle économique des annonceurs et des éditeurs

 

Pour découvrir l’autre nœud de la controverse

La collecte de données

 

(1) Le cookie est l’équivalent d’un fichier texte de petite taille, stocké sur le terminal de l’internaute. Existant depuis les années 1990, ils permettent aux développeurs de sites web de conserver des données utilisateur afin de faciliter la navigation et de permettre certaines fonctionnalités. Les cookies ont toujours été plus ou moins controversés car contenant des informations personnelles résiduelles pouvant potentiellement être exploitées par des tiers.