Neurosciences et Éducation
Une science dure pour l'Éducation?

Qu'est ce qu'une preuve scientifique ?


 Dans les salles de classes ou dans les laboratoires de recherches, de nombreuses expériences sont menées. A l’issues de celles-ci, des résultats sont données, démontrées empiriquement. Mais ces expériences sont-elles suffisantes pour amener à une preuve inéluctable ? Revenons dans un premier temps sur la définition d’une vérité scientifique selon les différents types de sciences.

 On dénombre habituellement deux types de vérité scientifique (Popper, 1989) : la vérité par constructions logique, d'abord. Partant d’axiomes ou de postulats initiaux, les scientifiques établissent des propriétés et théorèmes provenant uniquement de raisonnements logiques ou mathématiques, qui ne peuvent donc pas être contredit par d’autres théories, puisque fondamentalement vraie. Existe également la vérité issue de l’expérience, qui concerne simplement les résultats bruts des différentes expériences menées scientifiquement. C'est précisément ce type de vérité qui nous intéresse en neurosciences. C'est également le type de vérité le plus sujet à controverse. Prenons l'exemple de la méditation de pleine conscience, nouvelle technique en vogue depuis quelques années pour s'apaiser et se recentrer sur soi-même. Nombreux sont ceux qui ont adopté cette nouvelle technique, du PDG à l'enseignant, rencontrant un succès immédiat avec des résultats très rapides; on dénombre en 2014 plus de 700 études "scientifiques" sur le sujet (Sultan-R'bibo & Rescan, 2014) Pourtant, "Les études en neurosciences montrent des images fascinantes des transformations du cerveau qu'entraîne la méditation. Spectaculaires outils de marketing pour militer en faveur de cette pratique, elles ne prouveraient cependant pas grand-chose. C'est ce que révèle une autre méta-analyse, publiée en avril 2015 dans la prestigieuse revue scientifique Nature Reviews Neuroscience, qui dénonce le manque d'études rigoureuses." (Borde, 2015). Les études scientifiques menées sur ce sujet auraient donc été validées trop vite, et n'auraient pas suivi les différentes étapes de validation scientifique de rigueur. « Si on veut considérer cette approche comme un outil qui améliore la santé et le bien-être, et pas seulement comme une philosophie de vie, il faut accepter les règles du jeu scientifique », d'après Timothy Caulfield, professeur à l'École de santé publique de l'Université de l'Alberta.  En neurosciences, il y a d’un côté les neurobiologistes qui cherchent à rendre intelligibles les interactions des neurones, les cellules qui composent notre cerveau, et leurs milliards de connexions électriques, et d’un autre côté les psychologues cognitifs s'attachent à bâtir des modèles descriptifs et explicatifs sur les processus par lesquels nous recevons et traitons les informations, formons et organisons nos représentations, décodons le langage, raisonnons, prenons des décisions ou résolvons nos problèmes (Reverdy et Gaussel, 2016). Ces deux sous-domaines scientifiques travaillent sur le développement des neurosciences de façon totalement différente : quand les neurobiologistes “mettent la main dans le cerveau” à étudier biologiquement les mécanismes du cerveau, les psychologues cognitifs s’appuie sur l’expérience pour tenter d’approfondir notre connaissance sur des thèmes comme le langage, la mémoire, l’apprentissage. Les résultats scientifiques proposés par ces deux branches scientifiques sont donc différentes par bien des aspects, et la véracité de ceux-ci est déterminé par des critères différents. Ainsi, quand un article s’intitule “La preuve par la neurobiologie que nous sommes tous créatifs. Oui, oui, tout le monde.” (Lorenzo, 2017), il convient d’émettre des réserves et de discerner ce qui a réellement été prouvé; la majorité des articles scientifiques en neurobiologie usent du conditionnel pour présenter leurs résultats et leurs interprétations (Toscani, 2015).


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