Acteurs de la controverse : les associations familiales


Présentation générale des associations familiales :

Ces associations familiales sont tout d’abord des groupes clairement positionnés politiquement, et malheureusement, la plupart du temps, d’influence extrême droitiste. On pourra s’en convaincre en prenant l’exemple de la plus importante association française de ce type, l’association « Famille de France », fondée en 1947 lors de la fusion de trois associations de ce type. La position politique de cette association ne laisse en effet aucun doute, dès lors que l’on se donne la peine de lire certains manifestes qu’elle a produit sur des thèmes sensibles tels que l’IVG (recommandant à « la société de soutenir la fonction parentale, en ne déresponsabilisant pas les parents au moment de l’acte grave qui va inaugurer la vie sexuelle de la jeune fille » (sic)), l’adoption homosexuelle (en mettant en garde contre « le risque pédophilique toujours présent chez les couples homosexuels masculins qui désirent adopter, même si les personnes concernées croient n’avoir en aucun cas de telles tendances » (re-sic)), ou bien que l’on porte un regard critique sur les présidents de cette association, comme par exemple l’actuel président Henri Joyeux, ayant animé la première édition du forum de la communauté de Saint-Jean, manifestation réunissant des représentants des mouvements catholiques réactionnaires ou conservateurs les plus dynamiques : associations anti-IVG, groupes charismatiques, Scouts d’Europe, etc. Voilà située cette association dans le paysage politique français.

Ces associations familiales sont des lobbys importants, pour la simple et bonne raison que leurs dirigeants sont la plupart du temps des personnes assez haut placées, et ce dans des domaines très divers de la société : pour reprendre l’exemple de « Famille de France », cette association possède des représentants dans les organismes de régulation des médias, la Santé, l’Education ou encore l’Environnement. Elle possédait en outre en 1992 un budget de 6,9 Millions de Francs.

Une autre cause du poids certains de tels lobbys est la forte unité au sein de leur direction. Les comités dirigeants ces associations sont en général très unifiés idéologiquement.

Caractéristiques du discours des associations familiales en matière de jeux vidéo :

Les associations familiales sont l’un des rares acteurs de notre controverse à ne pas avoir de discours ambigu sur la question des jeux vidéo : ils sont unanimement décriés par ces mouvements familiaux, que ce soit sur la question de la violence dont ils imprègnent les enfants, la relation de dépendance qu’ils créent vis-à-vis des enfants, ou encore leur caractère abrutissant et dévastateur dans le développement infantile.

Au niveau de la richesse de l’argumentation et de la précision de la documentation, on note en revanche quelques différences : on reconnaîtra l’effort certain de documentation et de réflexion de l’association « Union des Familles » dans son article on-line, dans lequel la question des la violence et de l’addiction par les jeux est développée autour d’interrogations pertinentes, alors qu’on restera très sceptique vis-à-vis des propos tenus par « Solidarité et Progrès », qui accuse dans cet article la violence dans les jeux vidéo d’être « une menace pour la civilisation humaine, au même titre qu’une épidémie mortelle » (sic !!).

Les principales sources d’information de ces associations sont les travaux des médecins anti-jeux (il existe en effet deux courants de penser parmi les médecins : ceux clairement positionnés contre les jeux vidéo, et ceux qui tentent de les déculpabiliser). On pourra d’ailleurs regretter qu’en aucun cas les études d’autres médecins, plus modérés dans l’incrimination systématique des jeux vidéo, ne sont citées par ces associations.

Position des associations familiales face à la question « jeux vidéo et violence » :

La position de ces associations quant à la question de la nocivité de la violence dans les jeux vidéo est sans équivoque : cette violence est, selon eux, dévastatrice pour l’épanouissement de l’enfant. Cette violence est dévastatrice pour l’enfant pour plusieurs raisons :

Tout d’abord, elle est accusée par ces associations familiales de dédramatiser la violence aux yeux des joueurs. En effet, banalisant l’action de tuer et de massacrer, les jeux habituent progressivement les joueurs à tirer sur autrui sans éprouver d’horreur. Il faut savoir qu’il existe aux USA des logiciels d’entraînement ressemblant fort à des jeux vidéo, dont le but est précisément d’entraîner les forces de l’ordre et les militaires à savoir user de leurs armes si nécessaire. Les associations familiales rétorquent alors que si de tels programmes peuvent être employés pour désinhiber des adultes, il est clair que des jeux vidéo leur ressemblant trait pour trait ont le même pouvoir de désinhibition sur les joueurs, les habituant ainsi à viser la tête sans éprouver d’horreur (cf : http://solidariteetprogres.online.fr/Campagnes/CampagneJeux.html.

Pire encore, cette violence empoisonne l’imaginaire du joueur, puisque les images lui sont délivrées en toute objectivité, sans que son esprit n’ait le temps de prendre du recul vis-à-vis de ce qu’il perçoit, contrairement à des activités telles que la lecture, où c’est avant tout l’esprit du lecteur qui façonne ce qu’il perçoit, comme l’explique l’article affiché à l’Url http://www.uniondesfamilles.org/le_danger_des_jeux_video_violents.htm.

Ensuite, cette violence encourage les comportements agressifs. Les associations familiales fondent l’essentiel de leur argumentaire sur le discours des professionnels de la santé mentale ayant mené des études tendant à prouver le caractère incitatif de la violence contenue dans les jeux : c’est ainsi qu’en s’appuyant sur des chiffres émanant de ce genre de travaux. L’association « Union des familles » explique donc sur la page http://www.uniondesfamilles.org/etudes_scientifiques_jeux_video.htm qu’une étude réalisée en Septembre 1998 par le département de l’Université de Tuente, aux Pays Bas, sur 278 enfants des niveaux de classe 7ème et 8ème tend à montrer qu’ « On n’a pas trouvé de relation significative entre l’usage de jeux vidéo en général et des comportements agressifs. En revanche, une relation très significative est apparue entre l’usage de ces jeux et un comportement peu sociable. On n’arrive pas aux mêmes conclusions pour les filles et pour les garçons. La comparaison entre les goûts pour certains types de jeux vidéo et les comportement donne des résultats plus significatifs : les enfants, particulièrement les garçons, qui préfèrent les jeux violents sont plus agressifs et manifestent moins de sociabilité que les autres. D’autres analyses montrent que les mineurs qui préfèrent les jeux violents tendent à être moins intelligents.»

L’autre argument de poids des associations familiales, pour abonder dans ce sens, sont les divers massacres ayant eu lieu depuis 1999, massacres perpétrés par des joueurs compulsifs de jeux vidéo. L’association Famille de France écrit par exemple à propos du massacre de Littleton, le 20 Avril 1999 (où deux jeunes adolescent du lycée de Columbine ont ouvert le feu sur leurs camarades avant de se suicider) que « les assassins de Littleton étaient des fanatiques de Doom et Quake, dont le jeu Requiem est une réplique. Le message de destruction et de délinquance que véhiculent G.T.A. ou Rampage peut conduire des adolescents, voir des enfants, à des comportements asociaux ». De même, l’association « Solidarité et Progrès » écrit (voir http://solidariteetprogres.online.fr/Campagnes/CampagneJeux.html) à propos de la tragédie d’Erfurt (le 26 Avril 2002, Robert Steinhäuser, 19 ans, lycéen dans la ville allemande d’Erfurt, a ouvert le feu dans son ancien collège, tuant douze professeurs, une secrétaire, deux lycéens et un policier avant de se suicider) que «face à cette vague de « nouvelle violence », il est urgent d'interdire les jeux vidéo violents et de revenir à une éducation humaniste classique. »

Position des associations familiales face à la question « jeux vidéo et dépendance » :

Là encore, l’unicité des opinions au sein des diverses associations familiales est remarquable. Elles accusent systématiquement les jeux vidéo de rendre les enfants dépendants, et ce de diverses manière :

Premièrement, d’un point de vue purement clinique, les associations se fient aux travaux de certains médecins pour affirmer que la pratique assidue de jeux vidéo entraîne la sécrétion de plusieurs substances agissant sur le cerveau, notamment la dopamine, neurotransmetteur responsable du phénomène de manque chez les alcooliques ( !), ou encore l’adrénaline, substance secrétée par les glandes surrénales lors de situations stressantes.

Deuxièmement, les associations familiales accusent les jeux vidéo d’enfermer l’enfant dans un schéma de dépendance, en lui permettant de laisser libre cours à ses pulsions malsaines lorsqu’il joue. Maîtrisant alors de moins en moins bien ses émotions, il devient de plus en plus « accro » à ces séances de défoulement que lui procure les jeux, ce qui l’enferme dans un cercle vicieux.

Les chiffres cités par ces associations sont très souvent alarmistes. Ainsi, sans se donner la peine d’expliciter de manière précise ce qu’ils entendent par « dépendance de l’enfant aux jeux vidéo », les membres de l’association « Union des Familles » n’hésite pas à affirmer (voir http://www.uniondesfamilles.org/etudes_scientifiques_jeux_video.htm que selon une étude (dont on ne spécifie pas l’auteur) réalisée sur 387 adolescents âgés de 12 à 16 ans, « un jeune sur cinq est actuellement dépendants des jeux vidéo violents ».

Position des associations familiales face à la question : « jeux vidéo et développement infantile » :

Les associations familiales sont unanimes : les jeux vidéo nuisent à l’épanouissement de l’enfant, et ce sur plusieurs tableaux :

Tout d’abord, d’un point de vue social, ils empêchent l’enfant de nouer les contacts qu’il devrait avoir à son âge. La pratique du jeu rend donc l’enfant asocial et le replie sur lui-même. Les propos de l’association « Famille de France », rapportés sur la page http://www.uzine.net/article1074.html vont dans ce sens, puisque selon cette organisation, « Le message de destruction et de délinquance que véhiculent G.T.A. ou Rampage peut conduire des adolescents, voir des enfants, à des comportements asociaux. ».

Ensuite, d’un point de vue intellectuel, ils gêne la mise en place de barrières fermes entre réalité et potentialité : l’enfant satisfaisant constamment ses pulsions dans le cadre du jeu vidéo peut être tenté de jouir des mêmes libertés dans la réalité, ce qui pourra provoquer à long terme sa marginalisation.

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