L'histoire d'un monopole

Des infrastructures coûteuses

L’électricité est un bien qui ne peut pas être stocké facilement c’est pourquoi il est produit par une entreprise de connectée au réseau de transport. La mise en place de celui-ci a nécessité des investissements colossaux. Le coût des infrastructures n’a pas pu être pris en charge par des entreprises privées qui ne disposaient pas d’une solvabilité suffisante. De ce fait, l’état a pris en charge le financement de la mise en place de ce réseau.

L’apparition d’un monopole naturel

Deux facteurs essentiels favorisent le monopole naturel. Le premier est un temps de retour sur investissement très long. Le retour sur investissement d’une entreprise qui mettrait en place l’infrastructure nécessaire à la production et à la distribution d’électricité s’effectue à très long terme. Le second est le coût marginal très bas. Le coût de production d’une unité supplémentaire est très faible comparé au coût moyen. En d’autres termes il est toujours bien plus avantageux qu’une seule compagnie prenne en charge la production d’électricité plutôt que de répartir cette activité entre plusieurs compagnies. C’est ainsi qu’au sortir de la seconde guerre mondiale, les champions nationaux maîtrisent la totalité du processus : la production, la transmission, la distribution et la commercialisation.

La remise en cause du monopole naturel

Une fois les principales infrastructures mises en place, les investissements dans le secteur de l’électricité sont plus faibles et le modèle de monopole naturel est remis en cause. En outre, des innovations dans ce secteur permettent de réguler en temps réel la demande d'électricité, avec par exemple la production hydroélectrique de barrages. De nouvelles perspectives dans la distribution d’électricité apparaissent. EDF commence à exporter de l’électricité vers des pays frontaliers. L’idée d’une possible concurrence commence à se profiler.

A la fin des années 70, une vision plus libérale de la distribution d’électricité naît. Le développement des modes de financement des entreprises semble pouvoir permettre la fin du monopole. Les libéraux souhaitent la séparation

  • de la gestion du réseau (grandes infrastructures et lourds investissements)
  • et des services à forte valeur ajoutée (commercialisation par diverses entreprises)
  • Les partisans du néolibéralisme, eux, valorisent la concurrence et préfèrent une déréglementation (ou dérégulation) du marché.

    La construction progressive du Marché intérieur européen

    La déréglementation du secteur électrique s’inscrit dans le projet de constitution d’un Marché intérieur de l’Union européenne proposé par L’Acte unique européen en 1986. Les textes qui ont lancé le mouvement de déréglementation sont les directives

  • 96/92/CE du 19 décembre 1996 qui instaure une ouverture progressive des marchés nationaux de l’électricité, avec pour date butoir 2006
  • 2003/54/CE du 26 juin 2003 définit les règles pour le marché intérieur de l’électricité et qui abroge la directive 96/92/CE
  • En France, les lois suivantes proposent des moyens concrets pour respecter les directives

  • La loi 2000-108 du 10 février 2000 traite séparément de la production, du transport et de la distribution d’électricité.
  • La loi 2003-08 du 3 janvier 2003 décrit les dispositions relatives au service public de l’électricité
  • La Loi 2004-803 du 9 août 2004 impose des réglementations aux entreprises gestionnaires de réseaux de transport d’électricité ou de gaz.
  • La déréglementation élargit progressivement l’ensemble des personnes éligibles. Un client éligible est un client qui peut choisir son fournisseur et en particulier qui peut choisir de ne pas prendre EDF comme fournisseur. C’est ainsi que les décrets établis par le Conseil d’Etat déterminent des seuils de plus en plus bas :

  • Le 19 février 1999 : la directive 96/92 est applicable directement pour les sites consommant plus de 100 GWh/an.
  • Le 29 mai 2000 : le décret 2000-456[] fixe le seuil d'éligibilité à 16 GWh/an (environ 30 % de la consommation est concernée sur 1400 sites principalement industriels)
  • Le 5 février 2003 : le décret 2003-100[] abaisse le seuil à 7 GWh/an (environ 37 % du marché représentant près de 3000 sites)
  • Le 23 juin 2004 : le décret 2004-597[] établit que toute consommation non résidentielle est éligible à partir du 1er juillet 2004 (environ 70 % de la consommation est concernée sur environ 2,3 millions de sites).
  • Le 1er juillet 2007 : les directives européennes prévoient qu'au plus tard au 1° juillet 2007 tous les clients seront éligibles.
  • Le troisième paquet législatif de la commission européenne, proposé en septembre 2007, assure aux citoyens européens les bienfaits d’un marché concurrentiel de l’énergie. Il comprend

  • la séparation effective de la production et de la distribution d’électricité des activités de gestion du réseau
  • une meilleure harmonisation des puissances
  • la création d’une instance nationale de régulation de l’énergie
  • la création d’une instance pour veiller à améliorer la coordination des réseaux et à augmenter la sécurité
  • d'avantage de transparence au niveau des opérations au sein du marché de l’énergie
  • Ce troisième paquet propose en fait différents modèles pouvant conduire à un Marché intérieur européen. Les deux modèles sont l’ISO et l’ownership unbundling . Ce dernier modèle semble être celui retenu par la Commission Européenne.