Différentes méthodologies

Depuis plusieurs décennies, la volonté de trouver une corrélation entre l’intelligence d’une personne et la génétique est un sujet qui passionne les généticiens. Il y a vingt ans, par exemple, des études ont été réalisées afin de savoir quelles variations génétiques permettaient à une personne d’apprendre plus facilement à lire. Ces études, dites de liaison, avaient pour objectif de mettre en évidence les liens qui existent entre chaque gène, elles demandaient un petit échantillon de personnes ayant un lien de parenté. Ces recherches ont rapidement été mises de côté car elles permettaient uniquement de mettre en évidence certaines variations génétiques qui ont un impact fort sur le phénotype d’une personne (par exemple difficultés à lire). Les études de liaisons génétiques ont alors laissé leur place aux études d’associations génétiques qui sont des méthodes plus puissantes pour trouver de petites variations génétiques. Elles permettent de mettre en évidence des associations d’allèles à l’origine de variations macroscopiques importantes mais requièrent un échantillon plus large d’individus n’ayant pas forcément de lien de parenté. Plus les temps avancent, plus les attentes sont précises et donc plus les différentes méthodes pour trouver les corrélations entre variations génétiques et différences phénotypiques se doivent d’être précises. Les études d’association ont mis à la disposition des généticiens plusieurs centaines de milliers de séquençages de gènes qui permettent aujourd’hui aux scientifiques de réaliser des GWAS, l’acronyme de ce titre renvoie aux études d’association génétique à grande échelle (Genome-Wide Association Studies).

Ces premières études d’associations génétiques ont été réalisées par l’entreprise deCODE . En 2013, une étude prenant en compte un échantillon de 127 000 personnes a été réalisée dans le but de mettre en évidence les corrélations qui existent entre les variations génétiques et les variations de score de QI des personnes dont l’ADN avait été séquencé. Cependant cette étude fut un échec car elle n’a permis de mettre en évidence que l’existence de trois gènes spécifiques qui seraient à l’origine d’une variation de seulement 0,3 point de QI ce qui signifie que si le matériel génétique d’une personne contient deux paire de ces trois gènes, son QI peut potentiellement augmenter de 1,8 points soit pour une personne ayant un QI à la moyenne (100), ces trois gènes influencent au maximum 1,8% de la note de QI. Cependant, la majorité de chercheurs qui travaillent dans le domaine de l’intelligence due à la génétique estime que nous devons environ 50% de notre intelligence à la génétique. Selon Daniel Benjamin, un sociologue qui enseigne au Trinity College à Dublin :

« Studies of more than 1 million people will be needed to find enough common gene variants to explain 15% of the variation across people in IQ scores, educational attainment and other behavioural traits. » (Callaway, 2014)

Malgré les innovations qui ont conduit la science de la génétique, certains problèmes demeurent tout de même pour mettre en évidence des variations génétiques à faible impact sur certains aspects phénotypiques d’une personne. Entre autres, la taille de l’échantillon étudié est souvent remise en cause par les chercheurs comme Daniel Benjamin. Certains scientifiques pensent qu’il est nécessaire de séparer les effets des gènes de ceux de l’environnement. Avant la génétique moderne, les chercheurs ont développé une équation, appelée héritabilité, qui comme pour le QI n’est pas une mesure absolue. Au lieu de cela, il décrit la contribution que les gènes et l’environnement apportent à la variance de certains traits – par exemple le QI – autour de la moyenne pour la population. Pour le mettre sous la forme d’une équation, si V est la variance, G la contribution génétique et E l’environnement, alors V = G + E + (G*E). En termes simples, les gènes et l’environnement sont sensés fonctionner de manière additive avec une petite composante (GXE) pour leur interaction. Les analyses de Robert Plomin pour mettre en évidence que l’intelligence est due à 50% aux gènes se basent d’ailleurs sur cette équation. Pour Steven Rose, professeur de biologie à l’Open University en Angleterre,  les scientifiques prennent deux hypothèses fortes que sont d’une part que l’intelligence est mesurable et d’autre part que l’on minimise le facteur G*E c’est-à-dire que l’on dissocie gène et environnement. Ces deux hypothèses sont d’après lui à l’origine d’erreurs dans les analyses GWAS. En effet, certaines études donnent une estimation de l’héritabilité de 70% pour les enfants des familles de la classe moyenne, mais de moins de 10% pour ceux des familles pauvres, où l’environnement est vraisemblablement moins stable. D’ailleurs Steven Rose conclue (Rose, 2013):

 «It is a changing environment, rather than changing genes, which must account for the fact that the average IQ scores across the developed world have increased by some 15 points over the past century, to the puzzlement of the determinists. »