Riches et pauvres, inégaux devant l’héritabilité?


« Chez les plus pauvres, l’héritabilité est de 8%, alors qu’elle est de 72% chez les plus aisés » (Kraus, 2012)

Il y a aujourd’hui 2 candidats pour expliquer l’intelligence ou la réussite scolaire : la génétique et l’environnement, dont l’importance dans la détermination de l’intelligence pouvait être quantifiée par l’héritabilité..

Du point de vue de l’environnement, de nombreuses inégalités sont mises en avant : les enfants dont la famille a un statut socio-économique supérieur ont tendance à sortir plus, à lire plus, à se cultiver davantage, et peuvent se faire aider dans ses devoirs, car beaucoup de familles aisées sont formées de parents ayant fait des études (Lorriaux, 2014).

Mais s’il est communément admis que cela a un effet au niveau de l’influence environnementale, certains affirment que l’environnement lui-même joue un rôle dans l’expression des gènes : il ne faudrait pas distinguer environnement et génétique, mais plutôt les considérer comme agissant réellement ensemble. Il se pourrait donc qu’il y ait une inégalité dans l’héritabilité entre les milieux aisés et désavantagés : Ian J. Deary, Lars Penke and Wendy Johnson, dans The neuroscience of human intelligence differences (Deary et al., 2010), soulignent que dans le cadre de la génétique quantitative il est difficile de réellement évaluer l’influence de la génétique par rapport à l’environnement purement à partir de la variance (ce dont les scientifiques disposent en pratique) car le milieu social et l’intelligence ne sont pas indépendants. On observe chez les personnes de milieux sociaux très favorisés que les gènes liés au QI semblent davantage s’exprimer. Par ailleurs les gènes peuvent changer la structure du cerveau qui elle-même a une influence indirecte sur l’intelligence. Beaucoup justifient cela par le fait qu’un environnement défavorable ne permet à un enfant d’exprimer tout son potentiel génétique.

Cependant cette interaction, aussi nommée Scarr-Rowe interaction, est parfois contestée. David N. Figlio, Jeremy Freese, Krzysztof Karbownik, and Jeffrey Roth, dans Socioeconomic status and genetic influences on cognitive development (Figlio et al., 2017), suggèrent que les interactions entre environnement et génétique sont très complexes. Mais après avoir étudié les résultats scolaires de milliers d’enfants, prenant en compte leurs ethnies et milieux sociaux, ils n’ont pas trouvé de preuve de l’existence d’une telle interaction.

Le débat reste donc ouvert. Avec les progrès rapides des techniques scientifiques, peut-être pourrons nous, dans les prochaines années, savoir si l’héritabilité diffère selon la classe sociale…