David Forest

Entretien avec David Forest, avocat en propriété intellectuelle et chroniqueur en droit.

Cet avocat a autorisé une revue à publier son article. Sans l’en informer, celle-ci a mis l’article en libre accès sur Internet. Il invoque alors le droit d’auteur, très protecteur en France, pour expliquer en quoi l’Open Access peut être dangereux pour les chercheurs.

L’Open Access, un système idéologique

L’Open Access est un idéal de partage de contenu au plus large public possible. Cependant, on ne peut pas empiéter sur le droit d’auteur, qui naît dès la production de l’oeuvre. Il faut absolument avoir l’autorisation expresse de l’auteur pour l’utilisation qu’on fait de son œuvre, sauf si on a une cession de droits. Cette autorisation est restrictive, c’est une licence. Elle s’applique à un contexte bien particulier : si on cède son droit patrimonial sur un article pour une revue papier, on ne l’autorise pas à publier le même article sur Internet sans notre accord. Le problème de l’Open Access est que les chercheurs ne sont pas bien au fait de leurs droits et peuvent se sentir obligés à publier sous une forme libre d’accès sur Internet, par des pressions de leur institution de recherche ou des revues légitimes dans leur domaine.

L’OA, un éventuel désavantage 

Un chercheur peut ne pas avoir intérêt à ce que son article soit mis en libre accès. Ce peut être pour des raisons à caractère personnel ou bien pour des raisons ayant trait à sa carrière : si un article est déjà sur Internet, on ne lui proposera pas de l’intégrer à un livre sur le sujet, par exemple. De plus, le chercheur peut faire une recherche qu’il offre gratuitement à une revue et refuser de céder ce même article à une plateforme en OA qui commercialiserait sa production. En effet, il a produit gratuitement une recherche et ne comprend pas pourquoi une plateforme internet ou une revue gagnerait de l’argent sur un produit qu’il a offert.

Un droit flou en matière d’Open Access

Les politiques en matière d’Open Access sont actuellement floues et laxistes, elles permettent d’empiéter sur le droit d’auteur. Il faudrait insérer la notion de licence plus clairement dans les textes de lois. Mais actuellement, le juge doit remonter toute la chaîne des droits pour savoir si le détenteur des droits patrimoniaux a donné son accord ou non. Il faut remarquer que la cession de ses droits patrimoniaux sur une œuvre implique que toutes les autres versions de cette œuvre devront recevoir un consentement de la part du nouveau détenteur des droits pour être publiées. Il y a aujourd’hui une volonté politique forte en France en matière d’Open Access, mais sa mise en oeuvre en revanche se relève complexe. Il faudrait que le législateur adopte un texte pour clarifier la situation.

Les Sciences Sociales et Humaines ? 

En droit, on ne fait pas de différence entre les STM et les SHS concernant le droit d’auteur. Une œuvre est protégée par le droit d’auteur dès sa création, quelque soit son contenu.

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