• Accueil
  • Mode d'emploi
  • <<< >>>
  • Historique
  • Les acteurs
  • Le coeur de la controverse
  • Glossaire
  • Sources
  • <<< >>>
  • Qui sommes-nous ?
  • Remerciements
  • Prouver une théorie


    I - Le type de preuve


    1) Epidémiologie


    L'objectif des études épidémiologiques est de mesurer le risque relatif d'une population exposée à certains facteurs par rapport à une population non-exposée de déclencher une maladie.

    Etude de cohorte

    Une étude de cohorte est une étude prospective d'une population saine qui dure plusieurs années. Les changements (apparition de maladies, …) qui apparaissent au sein de la cohorte sont comptabilisés au cours du temps et permettent de faire des statistiques en fonction de l'exposition à certains facteurs.

    Les facteurs de confusion sont présents avant le début de l'étude et sont difficiles à distinguer. Les résultats peuvent-être biaisés si ceux-ci ne sont pas estimés ni pris en compte (contrôles et/ou ajustements). De plus, pour réaliser une étude pertinente, il est nécessaire d'utiliser une cohorte de taille adaptée au phénomène étudié. Pour analyser les facteurs influençant l'apparition d'une maladie rare, cette taille doit être très importante (plusieurs dizaines de milliers de personnes). Ceci est donc extrêmement coûteux.

    Etude écologique

    Dans une étude écologique, l'unité d'analyse est une population. Contrairement aux études de cohorte, il n'y a pas de données sur chaque individu du groupe étudié. Il est donc difficile de distinguer les facteurs de confusion.

    Ce type d'étude est logiquement considéré comme moins fiable qu'une étude de cohorte. Cependant, il est bien moins coûteux. Il peut être mis en œuvre rapidement et sans beaucoup de moyens.

    Etude de cas-témoins

    L'étude porte sur une population déjà atteinte que l'on compare à une population saine qui a les mêmes caractéristiques. L'analyse utilise des questionnaires permettant de décrire les comportements des personnes avant le déclenchement de la maladie. Elle est donc rétrospective.

    Ce type d'étude fait appel à la mémoire des personnes. Elle est donc biaisée par l'oubli et la remémorisation des événements. En outre, les facteurs de confusion sont difficilement distinguables du fait de la similarité des populations.

    Etude expérimentale ou essai clinique

    Dans ce type d'étude, l'expérimentateur choisit le facteur qu'il veut étudier. La population testée est divisée en deux groupes de façon aléatoire (randomisation): l'un reçoit un traitement et l'autre un placebo (à leur insu). Les changements qui apparaissent au cours du temps sont ainsi attribués au traitement.

    Une étude de ce genre est très coûteuse et longue. Elle requiert également une population homogène de patients similaires, difficile à rassembler en raison des facteurs de confusion communs.


    2) Expérimentation animale


    Le principe est le même que pour les essais cliniques, mais les sujets utilisés sont des animaux (souvent des rongeurs). Ces études sont intéressantes car certaines ne pourraient être menées chez l'Homme à cause de leurs risques et de leurs coûts. L'inconvénient majeur est que les organismes des humains et des animaux sont différents. Ainsi, certains traitements efficaces chez l'un ne le sont pas chez l'autre et réciproquement. Ce type d'expérimentation pose également un problème d'éthique quant aux droits des animaux.


    3) Expérimentation In Vitro


    Ces études sont menées sur des cellules isolées de leur contexte biologique. Elles permettent d'outrepasser la complexité des phénomènes à l'échelle d'un organisme et ainsi d'éliminer un certain nombre de biais et de simplifier le système étudié. Identifier des mécanismes est ainsi plus aisé. Cependant, cette simplification limite ensuite la possibilité d'extrapoler les résultats à l'organisme tout entier.


    4) Méta-analyse


    Une méta-analyse réunit plusieurs études comparables (sujet, procédé) et les analyse au moyen d'outils statistiques. Un poids et un intervalle de confiance sont ainsi attribués à chaque étude afin de quantifier sa valeur scientifique.

    Ceci permet de rassembler un nombre de données extrêmement élevé et donc de fournir des conclusions plus solides.

    Cependant, les procédés utilisés par les différentes études, la qualité de la réalisation de l'étude et de l'analyse des résultats peuvent varier considérablement.



    II - Niveau de preuve


    Chaque étude comporte des avantages et des limites. Ainsi, ces preuves ne peuvent être considérées comme absolues. Il est donc nécessaire de combiner plusieurs études de différents types afin d'obtenir une preuve convaincante. Par exemple, la HAS (Haute Autorité de la Santé) distingue des niveaux de preuve ainsi que des gradations de recommandation qui s'appliquent aux études sur les médicaments. Cependant, une partie du clivage entre les scientifiques sur les effets du vin sur la santé peut être expliquée par les différentes façons de valider une théorie scientifique.

    • un fort niveau de preuve correspond à une étude dont :

    - le protocole est adapté pour répondre au mieux à la question posée,
    - la réalisation est effectuée sans biais majeur,
    - l'analyse statistique est adaptée aux objectifs,
    - la puissance est suffisante ;

    • un niveau intermédiaire est donné à une étude de protocole similaire, mais présentant une puissance nettement insuffisante (effectif insuffisant ou puissance a posteriori insuffisante) et/ou des anomalies mineures ;

    • un faible niveau de preuve peut être attribué aux autres types d'études


    Tableau des grades de recommandation


    Ainsi, l'IARC considère que les études de cas témoin ou écologiques sont insuffisantes pour établir une relation de causalité entre un facteur de risque et un cancer. Cependant, elles peuvent compléter les études de cohortes et les essais randomisés. En outre, pour être prise en compte, une étude doit remplir certains critères de qualité. La population étudiée, la maladie et le facteur d'exposition doivent être précisés. De plus, les auteurs de l'étude doivent avoir pris en compte d'autres variables qui pourraient influencer les résultats, ainsi que la confusion qu'elles pourraient entraîner à l'aide de statistiques. Enfin, les données utilisées pour conclure et leur traitement statistique doivent être précisés.

    Pour la brochure Nutrition et Préventiondes Cancers 2009, s'est basé sur les méta-analyses les niveaux de preuve établis par dans le rapport WCRF/AICR 2007. Paule Latino-Martel considère que le niveau de preuve pour les effets bénéfiques du vin sur la santé cardiovasculaire est bien plus faible que celui dont on dispose pour l'augmentation du risque de cancer. Elle a également rappelé que la plupart des études concernant les effets du resvératrol sur la santé sont des essais in vitro sur des cellules isolées ou sur des animaux. Les résultats ne peuvent donc être étendus à l'Homme sans précaution.

    Quant aux défenseurs du vin, ils déplorent l'absence d'étude de cohorte comparant des populations d'abstinents et de buveurs modérés, et d'essais cliniques randomisés permettant d'observer les effets du vin sur la santé en général. Cependant, il faut rappeler que ces derniers sont rarement mis en œuvre dans le domaine nutritionnel : ces essais sont interdits pour les facteurs de risque (alcool) pour raisons éthiques et ils sont techniquement quasiment impossibles pour les régimes alimentaires complexes.

    Ainsi, les différents acteurs semblent s'accorder sur le niveau de preuve requis pour considérer une théorie comme valide. Ils critiquent davantage les protocoles employés et les analyses tirées des études. Cependant, ceci semble légitime en raison de la complexité des mécanismes biologiques en jeu. Les variables et les facteurs de confusion considérés influent de façon très importante sur les résultats de l'étude.

    Cependant, le grand public ne semble pas comprendre ces distinctions. En effet, les différents types d'étude ainsi que leur puissance sont mal connus. En outre, de nombreux articles de presse omettent de préciser la nature de l'étude dont ils présentent les résultats. Ceci, combiné aux titres « vendeurs » donnés à ces articles, participe de la confusion de la population sur le sujet. Par exemple, le quotidien Libération titrait le 17 février 2009, « Ah, ce petit verre de vin quotidien qui favorise le cancer », et Le Figaro présentait le 21 mars 2011, « Un dérivé du vin contre l'obésité ». On peut également noter que la presse évoque rarement les limitations des études.



    - Pour une application plus concrète :
    -> Voir Le problème des seuils de consommation