Quelles nouvelles échelles ?

Quelle échelle locale en France pour les programmes d’action ?

L’échelle locale pour le 5ème programme d’action est l’échelle régionale. En effet, le programme d’action national est complété dans chaque région par des plans régionaux. Le dispositif actuel est décrit plus en détail sur cette page. Auparavant, le 4ème programme d’action était initialement uniquement constitué de programmes d’action départementaux. Ceux-ci s’appliquaient aux zones vulnérables et contenaient obligatoirement les six mesures de l’annexe III de la directive « nitrates », en plus des deux mesures issues du Grenelle de l’environnement – obligation de maintenir une bande enherbée autour des plans d’eaux (à partir de 2009), et de couvrir les sols à 100% à l’automne (à partir de 2012) [1]. Cependant, il n’y avait pas de socle minimal pour les mesures issues de la directive : ainsi, les département avaient beaucoup de latitude, ce qui entrainait une grande hétérogénéité entre deux, même entre départements très proches. Celle-ci mena à un grief de la Commission Européenne sur l’architecture des programmes d’action : elle reprochait à la France l’application minimaliste des programmes d’action dans les départements [2]. Philippe Jannot explique : « eux [la Commission Européenne] ne comprenaient pas pourquoi deux départements voisins qui avaient le même climat, les mêmes sols, les mêmes productions agricole, avaient deux programmes d’action très différents. La raison étant tout simple : c’était que le préfet du département dans un cas avait mieux résisté à la profession agricole que dans l’autre cas, c’est tout. Mais ce n’est pas ce que la commission attendait qu’on réponde ». Ainsi, la France dut changer d’architecture pour son 5ème programme d’action.

Pourquoi une échelle régionale ?

Pour répondre au grief sur l’application minimaliste du programme d’action dans les départements, la France décida de créer un programme d’action national, qui fixe un socle minimal pour les département. Celui-ci leur donne moins de latitude qu’auparavant, et donc homogénéise les programmes départementaux. Ce programme national, allégé au départ (sans les deux mesures issues du Grenelle de l’environnement), est entré en vigueur en 2013 [1]. Bien qu’il soit prévu pour le 5ème programme d’action, il coexiste actuellement avec les programmes d’action départementaux issus du 4ème programme d’action [2]. Il s’appliquera ensuite aux programmes d’action régionaux lorsque ceux-ci entreront en vigueur (ce qui est prévu pour le printemps 2014). Cependant, dans la foulée de la création d’un plan d’action national, la France décida également de passer de l’échelle départementale à l’échelle régionale. Pourquoi ce changement, qui ne répond pas directement au grief sur l’architecture des programmes d’action ? Selon Philippe Jannot, « c’est plus facile pour nous de travailler avec 21 régions qu’avec 75 département, parce qu’il y avait 75 département qui avaient des zones vulnérables. Donc on s’est dit on allait passer au niveau régional : ce serait plus facile et plus lisible ». L’échelle régionale est donc un compromis entre la nécessité d’avoir une échelle locale et la volonté d’avoir un dispositif facile à superviser. Lorsque la France a transmis cette nouvelle architecture du 5ème programme d’action, la CJUE a supprimé le grief contre l’ancienne architecture dans le contentieux et a donc validé la nouvelle [2]. Il faudra cependant attendre la mise en application des programmes régionaux pour pouvoir juger avec certitude de la pertinence de cette nouvelle échelle. Nous pouvons cependant d’ores et déjà dire qu’elle a enlevé un poids à la France qui en avait bien besoin, en lui retirant un de ses griefs.

Références

[1] Arrêté du 23 octobre 2013 modifiant l’arrêté du 19 décembre 2011 relatif au programme d’actions national à mettre en œuvre dans les zones vulnérables afin de réduire la pollution des eaux par les nitrates d’origine agricole. Lien internet : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000028138654&dateTexte=&categorieLien=id#JORFARTI000028138690

[2] « La directive nitrates pour protéger l’eau des nitrates agricoles », présentation pour FNE de Emma Dousset et Philippe Jannot, 11 avril 2014