Controverse - Refroidir la Terre ?
Refroidir la Terre ?

Injection de fer dans les océans (Controverse)
  Principe Controverse autour de la méthode


Mais n'y a t-il pas de conséquences écologiques ?

Certaines espèces de plancton causent des marées rouges toxiques et d'autres phénomènes néfastes. Comment savons-nous quel type de plancton causera ces effets néfastes ? Qu'est-ce qui pourrait empêcher aux espèces toxiques d'intoxiquer les lagunes, les bassins de marées et d'autres écosystèmes sensibles le long de nos côtes ? L'augmentation forte et intensifiée de marées rouges ont fait des ravages sur la côte ouest de la Floride au cours des dix dernières années. Une fois que la chaîne d'une efflorescence algale nuisible ( HAB : Harmful Algal Bloom ) se produit, nul ne sait comment y mettre fin. Même si l'eau est trop froide pour être favorable à la marée rouge (d'après l'étude de K.Brevis), ces marées rouges ont prospéré. Selon les écologistes, même lorsque l'espèce de plancton la moins dangereuse meurt et se décompose dans l'océan, cela conduit à une mauvaise situation et une zone morte comme dans le Golfe du Mexique.

Quant aux partisans de cette méthode, ils affirment que la plupart des espèces de plancton sont inoffensifs voir même bénéfiques. En effet, les marées rouges et autres proliférations d'algues nuisibles sont en grande partie des phénomènes côtiers et touchent principalement les créatures qui se nourrissent de mollusques côtières. La floraison stimulée de fer ne fonctionne que dans les profondeurs des océans qui présentent une carence en fer. De plus, la plupart des eaux côtières regorgent de fer et en ajouter plus n'a pas d'effet. Pour ajouter à cela, les efflorescences de phytoplancton ne dure que 90 jours, au plus 120 jours, les parcelles des océans fécondées disparaissent longtemps avant d'atteindre n'importe quelle terre.

D'autre part, concernant l'épuisement d'oxygène dans les eaux profondes, une des critiques est que lorsque la floraison organique de détritus s'installe dans l'abîme, une fraction importante sera dévorée par des bactéries, des micro-organismes et autres animaux marins profonds qui consomment de l'oxygène. Une grande floraison pourrait, par conséquent, rendre anoxiques certaines régions de la mer profonde et menacer d'autres espèces benthiques. Les partisans de la méthode rétorquent alors que dans le sillage des grandes tempêtes de poussière, de nombreuses floraisons naturelles ont été étudiées depuis le début du XXième siècle et qu'ils n'ont jamais constatés une telle baisse d'oxygène dans les eaux profondes.

Quant à la modification des écosystèmes, les écologistes émettent la critique qu'en fonction de la composition et du calendrier de livraison du fer, certaines espèces pourraient être favorisées mais aussi que les surfaces des écosystèmes pourraient modifiées de façon inconnue. L'explosion démographique des méduses, des troubles de la chaîne alimentaire avec un impact énorme sur les populations de baleines ou de la pêche sont considérés comme des dangers potentiels. La réponse des partisans de la fertilisation de l'océan est que le dioxyde de carbone induit par le chauffage de l'eau de surface et par l'augmentation de l'acidité carbonique a déjà changé la répartition de populations du phytoplancton et du zooplancton.

Voici un schéma donnant la répartition actuelle des populations marines :

Les organisations écologiques telles que GreenPeace mais aussi WWF se sont déjà mobilisées contre les expériences.


Cette technique a-t-elle de l'avenir ?

Les partisans de cette technique affirment que l'utilisation de cette technique pour restaurer le plancton des océans permettrait de résoudre la moitié du problème de changement climatique, relancer la pêche et les populations de cétacés mais aussi atténuer plusieurs autres crises urgentes des océans. Les critiques diront que le réchauffement de la planète doit être résolu à la source, les expériences de fertilisation en fer à grande échelle n'ont jamais été tentées, les effets pourraient être insuffisants ou trop peu connus pour aller de l'avant.

Cependant, les critiques et les partisans sont d'accord sur le point suivant : la plupart des questions en suspens concernant l'impact, la sécurité et l'efficacité de la fertilisation en fer des océans ne peut être répondue par des études plus vastes. Plusieurs projets pilotes à grande échelle (couvrant environ 10000 km²) sont actuellement en cours d'organisation pour 2008 en collaboration avec divers instituts de l'océan et des laboratoires universitaires.

Par ailleurs, une expérience française a été menée début 2005 près des îles Kerguelen dans le cadre de la campagne océanographique KEOPS et Stéphane Blain, chercheur au Laboratoire d'Océanographie et de Biogéochimie de Marseille a commenté cette expérience : "les phénomènes naturelles sont trop complexes pour être reproduits par l'homme".


Voici une interview qui a été réalisée avec Stéphane Blain :

  • Que pensez-vous de la géo-ingénierie en général ?
    S.B. : C'est une façon de détourner l'attention des politiques, le plus gros effort à faire est de réduire nos consommations. Le rejet de fer dans les océans est la plus mauvaise méthode car elle est moins efficace, elle présente des incertitudes et des effets secondaires. Une solution moins dangereuse serait de stocker le CO2 dans des anciens gisements de gaz, c'est une solution à la marge. La géo-ingénierie ne peut pas prendre en argument le fait qu'imiter la nature ne conduira pas à de mauvaises conséquences pour la nature.
  • Vous avez participé à l'expérience KEOPS en 2005, est-ce que cette expérience a été concluante ?
    S.B. : Notre but était de savoir si dans certains océans, l'absorption du CO2 était limitée par le rejet de fer. Du fer a été jeté dans l'océan Australe et on s'est rendu compte que le plancton absorbe le CO2 mais que la pompe biologique fonctionne plus efficacement par l'apport de fer naturel qu'artificiel. 90% du fer jeté est perdu, il n'y a que 10% qui réagit.
  • Est-ce que cette méthode est toujours d'actualité ?
    S.B. : La société Planktos a abandonné cette méthode mais il y a une autre société Climos qui continue.
  • Est-ce qu'il y a encore des recherches actuellement ?
    S.B. : mon rôle n'est pas d'évaluer l'efficacité de la méthode, je m'intéresse au fonctionnement de la pompe biologique c'est-à-dire comment elle va régir dans le futur. Je participe actuellement à des recherches pour mieux comprendre le fonctionnement et si la pompe absorbera plus ou moins de CO2 dans le futur.

Globalement, l'avis des scientifiques est tranché : l'océanographe John Martin pense que plus il y a de fer pour le plancton, plus la ségrégation et la fixation du CO2 atmosphérique est forte. Il se base sur une observation, il compare les concentrations en fer et en CO2 prisonnières des glaces antarctiques, ainsi il remarque que ces valeurs étaient anti-corrélées sur les 180000 ans d'archives glacières consultées par carottage, tandis que Fuhrman pense que l'enrichissement du milieu marin risque de provoquer de graves perturbations des systèmes aquatiques, en modifiant la communauté planctonique présente et en perturbant les réseaux trophiques et biogéochimiques, Zeebe s'interroge sur la pertinence de cette méthode car il faudrait selon lui couvrir de larges surfaces régulièrement enrichies. Il se base sur les données obtenues de SOFex et le cycle du carbone.


Finalement, y a-t-il des possibilités financières ?

Depuis l'avènement du protocole de Kyoto, plusieurs pays et l'Union Européenne ont établi des marchés de compensation des émissions de carbone certifiés dont le commerce des crédits de réduction des émissions ( URCE ) et d'autres types d'instruments internationaux de crédit de carbone. En 2007, l'URCE a vendu entre 15 et 20 euros pour une tonne de dioxyde de carbone et les analystes européens prédisent que ce prix aura doublé d'ici 2012.

Puisque les scientifiques de la NASA ont fait état d'un minimum de 6 à 9% de réduction dans la production mondiale de plancton, ceci suggère qu'un programme de restauration international de plancton pourrait générer une capacité de séquestration du dioxyde de carbone d'environ 4 milliards de tonnes pour une valeur de 75 milliards d'euros ou plus en compensation des émissions de carbone. La fertilisation des océans est une technologie relativement bon marché par-rapport à la technologie d'épuration, à injection directe et d'autres approches industrielles. Cette technologie peut générer théoriquement des crédits pour moins de 5 euros par tonne de dioxyde de carbone. Compte tenu de ce potentiel de retour d'investissement, certains compensateurs de carbone suivent le progrès de cette technologie avec beaucoup d'intérêt, il en est ainsi pour la société Climos présentée plus haut.




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