Entretien avec Saadia Skalli, interne en pharmacie au centre hospitalier universitaire de Grenoble, le lundi 8 février 2010

Quel est votre métier, et quel rapport a-t-il avec le problème du vaccin contre la grippe H1N1 ?

Je m'appelle Saadia Skalli, je suis interne en pharmacie en poste actuellement au centre hospitalo-universitaire de Grenoble. Mon travail en pharmacovigilance consiste à analyser le lien de causalité entre les événements indésirables rapportés ou observés et les médicaments suspects. La pharmacovigilance intervient après la commercialisation du médicament pour surveiller le profil de tolérance des médicaments en conditions réelles d’utilisation. Elle permet également de faire émerger de nouveaux signaux d’effets indésirables graves ou de fréquence inattendue.

Un vaccin avec adjuvant présente t-il plus de risques qu’un vaccin sans adjuvant ?

Le terme adjuvant dérive du latin adjuvare qui signifie aider ou assister. Il désigne toute substance capable d'augmenter la réponse immunitaire de façon à ce qu'elle soit supérieure à celle produite par l'antigène seul. Certains vaccins n'ont pas besoin d'adjuvant car ils sont fortement immunogènes, pour d'autres, on y fait appel car la vaccination par l'antigène seul n'est pas suffisante pour assurer une protection vaccinale satisfaisante. On peut imaginer qu'en stimulant moins la réponse immunitaire, on est moins exposé aux maladies auto-immunes. Ce sont sans doute les séquelles de la polémique sur la sclérose en plaque et le vaccin contre l'hépatite B dont le lien de causalité n’a toujours pas été démontré par les nombreuses études pharmaco-epidemiologiques réalisées sur le sujet.

Quelles sont les conclusions de la pharmacovigilance sur le vaccin de la grippe A ?

Les conclusions sont accessibles sur le site de l'Affsaps : suivi de pharmacovigilance des vaccins grippaux A(H1N1). http://www.afssaps.fr/Afssaps-media/Publications/Bulletins À ce jour, d’après le bulletin n°14 (04/02/2010), 5,7 millions de sujets ont été vaccinés dont 4,1 millions de doses de Pandemrix® (disponible depuis le 21 octobre 2009), et 3307 cas d'effets indésirables on été déclarés, ce qui correspond à un taux de notification d’environ 7,6 pour 10 000 doses administrées. Ce taux observé n’est pas statistiquement différent de celui attendu avec le vaccin antigrippal.

Est-ce plus que pour un vaccin traditionnel de la grippe ?

On ne peut pas comparer réellement les 2 vaccins.

Comment expliquer que le taux d’effets indésirables pour le Pandemrix (vaccin avec adjuvant) soit supérieur à celui du Panenza (forme sans adjuvant) ?

En consultant le dernier bulletin de l’Afssaps n°14 (04/02/2010), il semble qu’effectivement le taux d’effets indésirables signalé pour Pandemrix soit supérieur au Panenza® : le taux de notification est de 7,6 pour 10 000 sujets vaccinés contre 2,4 pour 10 000. Cette différence est principalement liée à la présence de l’adjuvant responsable d’effets indésirables locaux de type douleur à l'injection (taux de réactions au site d'injection sous Pandemrix®: 24,9% contre 2,4 % sous Panenza®). À noter aussi que 95% des effets indésirables du vaccin Pandemrix® sont bénins, contre 86% pour le Panenza®.

La vitamine D peut-elle prévenir la grippe A ?

À ma connaissance, aucune étude n’est actuellement disponible sur les effets prophylactique ou thérapeutique de la vitamine D dans cette indication. NDR: Quelques jours après cet entretien, nous avons reçu l'e-mail suivant: "Fait tout à fait nouveau concernant la vitamine D que je découvre aujourd'hui même, c'est le lien suivant que vous invite à regarder sur le bénéfice de la vitamine D sur l'incidence de la grippe chez les enfants.... . L'étude est très bien construite et retrouve un effet bénéfique de la vitamine D. Elle suggère également une supplémentation chez les enfants en hiver."