La modification des habitudes

La Décroissance

D’autres acteurs remettent complètement en cause le système dans lequel nous baignons, avec plus ou moins de radicalité. Des associations écologistes qui prônent un ralentissement des mauvaises habitudes, une prise de conscience et un changement vers un comportement plus respectueux de l’environnement aux théoriciens de la décroissance qui veulent renverser le paradigme économique, des alternatives « révolutionnaires » renaissent régulièrement, comme celle de la décroissance.

Un de ces représentants, acteurs de la controverse autour de l’obsolescence programmée car il en est un vif critique, est l’économiste Serge Latouche. Dans son livre Bon pour la casse, les déraisons de l’obsolescence programmée, il explique très bien comment selon lui l’obsolescence est devenue, à la suite de plusieurs étapes décisives, une pratique permettant de soutenir le système de surconsommation dans lequel nous vivons, l’ère du « jetable ». C’est en effet ce qui l’énerve le plus : des outils, des objets dont la durée de vie se devait d’être longue et durable, comme un réfrigérateur par exemple, sont en train de devenir peu à peu des produits « jetable » : comme il le constate, des réfrigérateurs sont aujourd’hui construit non dans le but de durer, mais dans l’optique de suivre une mode. Ce phénomène est aussi remarqué par Camille Lecomte : les consommateurs sont de plus en plus tenté par faire des achats compulsifs, sans forcément réfléchir sur l’utilisation qu’ils vont en faire (pour finalement acheter une yaourtière qui va finir dans un placard à l’abandon, après trois essais, semi-concluants, de la machine).

Pour Serge Latouche et les autres promoteurs de la décroissance, c’en est assez. Il faut en finir avec ces pratiques déraisonnables et entrer dans un autre paradigme : celui de la décroissance. Selon lui, chercher un, et un seul, coupable dans cette affaire est inutile. Les arguments des entreprises pour se protéger des attaques qui leurs sont faites sont valables. C’est le système économique qui doit être remis en cause. Comme il le dit lui-même dans un entretien que nous avons mené avec lui :

 

 » Le débat est interminable, […] on ne parle pas de la même chose, les entreprises n’ont pas tort, leurs arguments sont valables. Elles sont elle-même des pièces d’un système, c’est pour ça que le tort n’est ni totalement les consommateurs ni totalement les producteurs, c’est la logique systémique d’ensemble. Pour moi l’intérêt du débat, c’est de faire avancer les idées sur la décroissance, c’est pas de faire une loi sur l’obsolescence programmée. « 

 

Selon les théoriciens de la décroissance, il faut repenser la consommation, et mettre un terme au paradigme de « croissance » qui est tant défendu par les politiques de tous bords car il nous mènerait à une catastrophe écologique sans précédent : les ressources terrestres ne peuvent pas supporter une croissance perpétuelles de nos économies. Comme le constate la Nasa, « Les changements technologiques augmentent l’efficacité des ressources, mais aussi la surconsommation ». Bref, la fautive, dans cette affaire de l’obsolescence programmée n’est personne d’autre que la croissance économique, avec son alliée la mondialisation.

Au delà du développement durable, qui est une manière de masquer la réalité, Serge Latouche, entres autres, revendique un nouveau modèle de société. Certains parlent de décroissance soutenable, d’autres de décroissance équitable, mais quoi qu’il en soit, l’idée reste la même. Serge Latouche, dans la revue Politis du 9 janvier 2003, dans un article intitulé « Sortir de l’économie », propose une société dans laquelle le loisir est valorisé à la place du travail, où les relations sociales priment sur la production et la consommation de produits jetables inutiles et nuisibles. Il remet en cause également le marché et sa logique de détermination des prix par l’offre et la demande. Il faudrait donc repenser les rapports entre producteurs et consommateurs, comme cela peut déjà se faire dans de petites structures de coopératives agricoles par exemple.