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Tradition et féminité

Bien que les origines exactes de l’excision sont inconnues, beaucoup de scientifiques les font remonter aux anciennes civilisations égyptiennes dans la vallée du Nil. Les habitants actuels de la vallée croient également que l’excision provient du temps des pharaons, d’où le terme contemporain “excision pharaonique” pour parler de l’infibulation. Cependant, une étude menée par Elliot Smith ne réussit pas à trouver la preuve que les femmes étaient excisées. Il y a toutefois des documents prouvant son existence dès 500 ans avant JC: selon Hérodotus, les Egyptiens, les Phéniciens, les Hittites et les Ethiopiens pratiquaient l’excision. Un papyrus grec de 163 avant JC mentionne également l’excision, ainsi que d’autres documents égyptiens et éthiopiens.

Durant l’Egypte ancienne, l’excision était liée à la croyance que les hommes naissaient à la fois homme et femme, l`esprit de l’homme étant dans le clitoris de la femme et celui de la femme dans le prépuce de l’homme. Les deux circoncisions étaient alors nécessaires (celle du prépuce et celle du clitoris) pour devenir complètement homme ou femme. Cette croyance est encore très répandue en Afrique, comme au Soudan et au Burkina Faso. Certaines ethnies (par exemple au Burkina Faso) pensent également que le clitoris est un organe dangereux qui peut tuer l’homme durant les relations sexuelles.

Dans toutes ces cultures, l’excision est la confirmation de la féminité et fait partie de la définition sociale de la femme; lors d’une étude faite sur 2000 femmes soudanaises, 49% donnaient comme raison principale pour l’excision la tradition et près de 25% lors d’une étude au Burkina Faso (d’après Alimata KONATE). Pour ces femmes, le clitoris est un organe vilain à voir et nuit à leur esthétique. Celles qui pratiquent l’infibulation se justifient souvent en disant préférer une peau lisse, dépourvue de tout relief. L’excision prend alors une dimension esthétique, telles les scarifications faciales des femmes (au Soudan par exemple) ou une simple boucle d’oreille. De ce point de vue, l’excision amplifie la féminité et contribue à sa définition. L’excision est un rite très important, au Soudan les femmes crient, une fois l’excision faite, sur une fille pour partager leur joie aux autres habitants. La fille reçoit ensuite des cadeaux (souvent de l’argent) de la part des amis de la famille.

La deuxième -et peut-être plus importante- raison est due aux valeurs morales de ces cultures. En effet, la virginité au mariage est d’importance vitale dans les pays tels que le Soudan. De simples rumeurs sur l’intégrité d’une fille peuvent suffire pour abîmer l’honneur de la famille et rendre la fille non mariable. Dans ce contexte l’excision (quelle que soit sa forme) offre en quelque sorte une garantie de la virginité de la fille, surtout l’infibulation. L’infibulation permet également, tout comme la ceinture de chasteté occidentale, de garantir la fidélité de la femme : c’est pour cette raison que les nomades réinfibulaient leurs femmes lorsqu’ils se séparaient d’elles. On ne peut cependant jamais garantir une totale fidélité, même en utilisant l’infibulation (la femme peut avoir été recousue après l’adultère) : certains musulmans affirment ainsi que l’infibulation est plus dangereuse que la “morale” (c’est-à-dire faire confiance au sens moral de la femme), car elle peut donner l’apparence de la morale sans pour autant en avoir les vertus.

Pourquoi ne pas faire confiance au sens moral de la femme? En se penchant sur ce problème, on ne peut appliquer les règles morales occidentales. En effet, il est attendu des croyants musulmans d’obéir à Dieu, mais ils ne sont pas tout seuls : c’est à la communauté de réunir les bonnes conditions. Il y a donc une responsabilité partagée : ainsi, tout le monde se sent concerné en cas d’infraction. En quelque sorte, ce qui compte est le résultat.