Gaspard Koenig -

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Entretien réalisé le 15 avril 2015, au domicile de Gaspard Koenig à Paris.

Le revenu de base pour vous qu’est ce que c’est ?

« Pour moi c’était d’abord un projet de vie, je suis un pro-libéralisme et dans le libéralisme et surtout dans la version friedmanienne « Capitalisme et Liberté », il y a un chapitre qui concerne le Revenu de Base.
« Le revenu de base, c’est une solution libérale la question sociale », la solution paternaliste que je réprouve c’est de donner des allocations différenciées en fonction des conditions des gens.
Donc l’Etat va voir les gens et leur pose des questions sur leur vie privée, c’est plutôt intrusif. Et en fonction de ces différents critères, il alloue des subventions ou des biens en nature. C’set un système humiliant et déresponsabilisant et il génère des injustices. 

La redistribution à la française se fait très mal, il y tellement de strates d’allocations et de subventions qu’il en y en a qui touchent le jackpot :
famille nombreuses aisées avec enfants 
et ceux qui n’ont rien :
jeunes jusqu’à 25 ans et plein d’autres.

C’est donc un projet un peu politique ou idéologique. L’idée c que vous donnez du cash aux gens « Friedman, : le cash c’est la liberté », donc si on dit il faut 1000 pour vivre dans une société X vous donnez 1000 en revenu de base et chacun arbitre ses propres besoins. C’est une aide qui inclue les gens dans la société au lieu de les en soustraire.

D’autre part, c’est une aide individuelle ! cela permet à l’individu de ses soustraire à son cadre familial ou professionnel pour retrouver son autonomie ; il est assuré de survivre

Dernière chose, dans une conception libérale du problème c’est à l’Etat de garantir le filet de sécurité.
Lee modèle sur lequel on vit, ie le modèle d’après guerre, c’est l’entreprise qui prodigue le filet de sécurité via le droit du travail, les charges etc (mode de plein emploi).
Aujourd’hui dans un monde entrepreneurial ou les gens sont de plus en plus indépendants ça va être à l’Etat d’assurer ce filet de sécurité via le revenu universel, et cela permet d’alléger tout le reste.
En effet, a partir du moment ou le filet de sécurité est basé sur l’individu, le SMIC tout ça c’est de la rigolade, on le retire Parce que on a fait passer la protection de l’entreprise à l’Etat.

Il y a un rôle fort de l’Etat dans sa relation directe avec l’individu. »

Le revenu de base dans l’Histoire, dans le monde qu’en dites vous ?

« D’ailleurs cette idée fait le tour du monde, cette forme d’impôt négatif vient de Friedman, elle a failli être insaturée aux Etats Unis dans les années 70, c’est arrivé en France via Lionel Stoleruc qui avait rédigé un livre (Combattre la Pauvreté), Mitterand en a fait le RMI, qui version dégradée du revenu de base, le RMI est devenu la RSA qui aujourd’hui devient la Prime d’Activité qui est vaguement mieux même si cela concerne uniquement les gens qui travaillent.
« Tout ça est un long mouvement historique qui dans 10 ou 20 ans deviendra un revenu universel. »

On en parle en Suisse. Ce qui est intéressant c’est que dans la Silicon Valley, où ils on conscience du problème de la robotisation et la disparition de la classe moyenne, donc du chômage de masse, ils réfléchissent aussi au revenu universel.

Il y’a donc des gens de tous les bords et de tous les cotés qui réfléchissent à ça


Le Revenu universel peut être tant d’extrême gauche que libéral, toutes les options sont possibles. Dès qu’on entre dans les détails c’est la qu’on est plus d’accord les uns avec les autres. 

Votre RDB ?

L’option que je défends, qui donc est libérale prend la forme d’un impôt négatif, donc d’un crédit d’impôt.
Le système on dit qu’il faut la somme X pour survivre dans un pays donné, on donne X a chacun et tout se passe sous forme de crédit d’impôt.
On fait payer ça par une taxe Y pour-cent sur les revenus, ce qui fait qu’à la fin du mois on fait la différence entre la taxe qu’on doit et le crédit dont on dispose, si la différence est négative ou touche du cash si elle est positive on contribue au système.

On rejoint le texte Foucault dans l’optique libérale.
On en finit avec toutes les question inquisitrices que posent les formulaires qu’on fait remplir aux gens, y compris les gens qui veulent le RSA. On leur demande avec qui vous vivez, est ce votre concubin…au final ce sont des questions très personnelles qui sont posées aux gens.
Et après on les accuse de tricher, et on risque se perdre ce RSA.
L’avantage du RDB c’set qu’il est universel et sans conditions. Cela évite d’infantiliser les gens. De toute manière toutes ces questions que l’on pose pour le RSA sont parfaitement invérifiables et ne peuvent qu’être mal gérées par une administration.

Pour moi, c’est libérateur de l’inquisition, des lourdeurs démocratiques, c’est libérateur du besoin de survie, puisque ça donne à chacun de quoi assurer son autonomie minimum.
C’est libérateur du carcan familial ou professionnel puisqu’il est possible de s’en soustraire à tout moment. Ça repose sur une conception optimiste de la nature humaine, qui est que les gens ne vont pas rester le bras ballants avec leur revenu universel. Au pire ce sera 5 % des gens, mais c’est très peu et au final peu important. La plupart feront des choses intéressantes et plus intéressantes que s’ils avaient peur du lendemain ».

Concernant le SMIC, faut il le baisser ou le supprimer ?
« Je n’ai pas une opinion tranchée, mais je pense que la question va se reposer et cela permettra de flexibilité la marché du travail et du coup de créer des emplois.

Après s’il faut baisser le SMIC ou pas je ne sais pas mais ce qui est sur c’est que les entreprises auront plus de marges de manœuvres puisque ce ne sera pas à elle de garantir la protection mais à l’Etat. »

Quel objectif ? Le revenu de base est plus un projet de société ou moyen de lutter contre le chômage ?

« C’est un moyen de lutter contre la pauvreté ! La grande pauvreté. C’est incroyable de vivre dans un état qui est l’état le plus dépensier au monde en termes de dépenses sociales (15% des dépenses sociales mondiales, 400 milliards de transferts sociaux par an), qu’on ai des gens à la rue qui n’ont strictement rien et qui n’ont droit à rien ! C’est tout à fait anormal. 

Alors qu’en parallèle on a des gens avec une situation tout à fait confortable ou la femme décidera de ne pas travailler puisqu’elle touche 2000€ d’allocations familiales, de quotient familial….on considère que c’est juste ça ?

Le système bénéfice aux retraités et aux familles nombreuses tandis que dans un système avec revenu de base les gens avantagés sont plutôt les actifs et les jeunes. Après c’est un choix de politique, un choix de société. 

Le RDB permet de garantir l’autonomie de base des gens, cela les rassure quant au lendemain. cela permet de lutter contre la pauvreté également !

Attention, il faut distinguer la lutte contre la pauvreté de la lutte contre les inégalités. En luttant contre les inégalités, cela empêche de bien lutter contre la pauvreté. Avec le revenu de base on lutte contre la pauvreté et non contre les inégalités du coup on est efficace contre la pauvreté. On ne pense pas en termes de redistribution, c’est la conséquence de l’analyse. On redistribue pour les individus et non parce qu’il y a des injustices ou des inégalités. 
Nous, ce que l’on souhaite ce sont des individus autonomes.

Le sens de l’histoire va vers le RDB mais en termes de mouvements, d’associations, on a l’impression que les droits qui tentent à être reconnus sont plus sélectifs « droit à la liberté », « droit au logement », avec le revenu de base on ne va pas du tout vers la reconnaissance de ces droits ?

Tout a fait. 
Le droit au logement c’est assez complexe est différent, on l’exclut du RDB, mais on peut l’inclure. 
Je préfère un monde dans lequel chacun à de l’argent et fait ses propres choix à un monde ou chacun a le droit à la nourriture, à un compte….je préfère un monde ou les gens vivent de leurs choix et de leurs responsabilités et surtout ou ils on doit à un minimum d’autonomie. »

Est ce que ce revenu de base est politiquement vendable ? Les gens ont il envie de ce système ?

« Le président de la Commission des Finances que nous avons rencontré nous a dit qu’on ne pouvait pas ne pas admettre que ce système que nous présentons est meilleur que le système existant.
Aujourd’hui la superposition de strates coute beaucoup trop cher (frais de gestion considérables). De plus c’est humiliant pour les gens d’aller quémander des aides, les gens se perdent dans des parcours et ne comprennent plus comment demander des allocations. C’set un système injuste.

Il y a chez nous un vrai désir social de simplification. En effet, on a juste besoin des revenus des gens à la fin du mois.

Les questions de revenu de base suscitant beaucoup d’intérêt, c’est discuté dans le monde il y a qqch au niveau mondial. De plus au niveau français, cela intéresse les politiques de gauche comme de droite. 

Il y a une motion dans le prochain congrès PS sur le revenu de base, je ne partage pas les principes sur lequel elle repose, mais il y a pas mal de croisements et cela montre que cela devient un sujet majeur.

Enfin, cela va devenir nécessaire étant donné le monde dans lequel on entre et qui est le monde de l’auto-activité. Certes, c’est un monde sympathique et créatif, mais aussi plus risqué et plus précaire. 

Il y a dans votre projet l’idée que les gens sont des entrepreneurs nés, mais est ce vrai ? Les gens ne cherchent ils pas plutôt un travail ?

Ce qui est beau avec ce système c’est que l’on fait ce que l’on veut. Si on veut devenir entrepreneur pourquoi pas, si on veut travailler en entreprise pourquoi pas non plus.
C’set universel, on anticipe pas les choix de vie des gens.
C’est un système à l’équilibre par définition, cela évite de lever de la dette ou d’endetter le budget de l’état; Le système que nous proposons est un système clos.

L’impôt est fictif, certains ne le paieront jamais. Ce système nettoie un autre problème, la complexité de l’imposition en France. »

Sur quoi vous basez vous pour fixer les montants ?

« Ce qu’on cherche c’est à faire accepter le système. Un fois ce dernier accepté, le montant du revenu universel est une question de choix collectif, qui est soumis au vote. Une fois le montant choisi par le vote, le politique n’intervient plus. Aujourd’hui le politique n’arrête pas d’intervenir dans le système d’allocations au gré des élections, dans une optique de politique politicienne.

Le niveau est un choix social. Il y a très peu d’études sur la pauvreté réelle en France. Le taux de pauvreté est calculé par rapport au salaire médian et pas par rapport aux besoins.

Les calculs sur la pauvreté réelles sont très rare, il y en a quelques unes du secours catholique, mais c’est tout.

DONC :
choix collectif
montant doit assurer la survie, cela ne doit pas se transformer en rente.
450€, correspond au RSA a peu près. »

A quelle échelle imaginez vous un revenu de base ?

« Plus c’est étendu mieux c’est !
Tout dépend de si on peut le gérer au niveau européen.
Si ce n’est fait qu’en France cela n’entraînerait il pas une forme d’immigration ? A qui le donne t’on ce revenu ?

On pense en termes de résident légaux. En France la conception de l’impôt est pas liée à la nationalité. Ce sont les résidents que le territoire qui paient pour les services dont ils ont droit. 

Pour l’immigration que cela engendrerait, je ne sais pas. 
La France aurait l’occasion de prouver son inventivité réglementaire et sociale et faire quelque chose de nouveau dont le monde s’inspirera peut-être. On viendrait étudier comment ça se passe en France. 

Quid des expériences à l’étranger ? Avez vous puisé dedans sur des points méthodologiques ?

Ce sont des expériences trop limitées pour être conclusives. Il n’y a pas de conclusions claires, c’set assez vague. C’est difficile de faire ça localement car cela se superpose forcément à un système national déjà existant.

A la rigueur, quand on est sur de ses principes et qu’on sait pourquoi on le fait, quand on voit que le système actuel est moyen voire mauvais. 

Comment en êtes vous venu à travailler avec Marc de Basquiat ?

Par hasard. J’étais à une émission de Frédéric Tadéi, et quelqu’un est intervenu sur le Revenu de Base. Je connaissais le sujet via Friedman. M. de Basquiat a rédigé un mail à tous les participants de cette table ronde en disant « ce que vous avez entendu n’est pas la vrai version du revenu universel, ne confondez pas tout… », j’ai pris contact avec lui pour discuter du sujet, j’ai lu ses travaux et de file en aiguille, je lui ai dit « pourrais t-on faire la même chose avec mes options idéologiques ? », dès que l’on part dans le détail de ce qu’on fusionne, a chaque ligne apparait une option politique à prendre. C’est en échangeant que l’on s’est retrouvé au plus près de ce qu’on pensait tous les deux. »

Avez vous des liens avec d’autres gens, d’autres mouvements ? Vous dialoguez ?

« Je suis en lien avec Van Parijs, avec qui je vais essayer de faire une grande conférence sur le revenu de base, en France. Celle ci regrouperait des gens avec des opinions différentes sur le sujet.

Je travaille également avec des gens à gauche. Il y a des croisements

Vous pourriez vous associer avec des gens, trouver un compromis ?

Dans un débat, on aurait chacun nos positions. 
Dans l’initiative citoyenne, ou lorsqu’il s’agit de présenter un projet par exemple il serait intéressant d’effectuer des croisements avec des gens qui ne sont pas de mon bord politique en question. »

Pourquoi ce sujet revient-il  sur le devant de la scène ?

« Je ne sais pas, mais je pense que c’est lié à la fin du modèle du plein emploi en entreprise. La question se pose de manière plus sociale. »