Télémédecine, délégation des tâches et revalorisation de la médecine générale

La télémédecine et la délégation de tâches

solutions 8

Parmi les 12 propositions de Marisol Touraine, on retrouve les solutions déjà évoquées par le passé du développement de la télémédecine et la délégation de tâches.

L’ANEMF avait soutenu ces mêmes propositions en ajoutant que grâce à la délégation de compétences et à la création de nouveaux métiers, le médecin deviendrait coordonnateur d’un réseau dans lequel il aura délégué certaines tâches. La télémédecine est également pour eux une solution permettant de désenclaver certaines zones trop éloignées

Cependant pour les sénateurs (rapport d’Hervé Maurey), les outils de médecine à distance ne constituent pas une solution aux déserts médicaux puisqu’aucun moyen technique, même le plus performant, ne peut se substituer à la présence d’un médecin dans un bassin de vie.  Les associations d’usagers sont également de cet avis : la position du CISS à ce sujet

                    Si la télémédecine est souvent présentée comme palliative à la désertification médicale de certaines zones géographiques, elle ne doit pas être développée en ce sens. Plus-value au service des professionnels de santé et des patients, la télémédecine peut permettre un bond qualitatif mais ne doit pas être une réponse aux problèmes de répartition des effectifs médicaux qui tiennent à une politique organisationnelle.

La télémédecine est donc appréhendée comme « un moyen de renforcer et d’enrichir la relation médecin-patient » (Hervé Maurey).

De plus, le développement de la télémédecine se heurte à des obstacles nombreux : d’une part on évoque les obstacles touchant de manière générale l’informatisation du système de santé : émiettement des prestataires de services, absence d’interopérabilité des divers logiciels, cloisonnement des systèmes d’informations ville/hôpital, et par ailleurs on évoque des obstacles juridiques et financiers car l’exercice de la télémédecine n’est pas reconnu dans le cadre de la classification des actes médicaux. Le CISS déclare à ce propos :

                       La télémédecine doit s’exercer dans un cadre technologique et juridique présentant un haut niveau de sécurité des échanges compte tenu des risques que comporterait la transmission d’informations dégradées et la divulgation de celle-ci à des tiers.


Par ailleurs, la responsabilité professionnelle des différents acteurs de la télémédecine doit être clairement définie et délimitée notamment celle des établissements, des professionnels de santé y intervenant, des prestataires de services ainsi que des fournisseurs de matériel.

La délégation de tâches permettrait quant à elle de dégager du temps médical et de permettre aux médecins de se recentrer sur ce qui constitue leur cœur de métier et leur valeur ajoutée spécifique. Hervé Maurey soulève que « cela implique d’optimiser les compétences de chacune des professions de santé ».

Pour faciliter cette opération, la loi HPST a mis en place un système de dérogations aux conditions générales d’exercice de leur profession qui autorise les professionnels de santé à s’engager dans une démarche de coopération sous la forme de transferts de tâches ou d’actes de soins. Les conditions générales d’exercice en question concernent l’organisation des activités de soins, assujettie à la définition des catégories de professions de santé établie par le code de santé publique. Les professions de santé se trouvent restreintes à une liste limitative d’actes qu’ils ne peuvent dépasser si ce n’est par les dérogations de la loi HPST.

Pour les sénateurs, il est donc nécessaire d’aller au-delà de refondre les textes sur la base de la notion de mission, comme c’est le cas à l’étranger pour sortir du simple contexte dérogatoire. Pierre-Yves Geoffard, économiste de la santé et directeur des études à l’EHESS nous donne l’exemple de l’Angleterre :

                     Leur système repose sur des cabinets de groupe, qui couvrent une population donnée, avec des praticiens dont les modes et les montants des rémunérations sont meilleurs.
Sur bien des points, les Anglais font au moins aussi bien que nous, et souvent bien mieux, tout en dépensant moins. Proportionnellement, le nombre des médecins est moins important et la prise en charge est de très bonne qualité, ce qui s’explique par la délégation de tâches médicales à d’autres personnels, comme les infirmières, les secrétaires médicales, les pharmaciens…

 

Revalorisation de la médecine générale

En étudiant les causes des déserts médicaux, nous avions soulevé le problème de la dévalorisation de la médecine générale qui entravait l’installation de jeunes généralistes en zones déficitaires. L’ANEMF propose donc de revaloriser la médecine générale en créeant une filière universitaire de médecine générale. Elle suggère ainsi d’introduire un enseignement théorique et pratique dès les premiers cycles du cursus et de faciliter la mise en place de stages au 2ème cycle.

Hervé Maurey déclare également :

                   une politique d’amélioration de l’accès aux soins passe par une politique de revalorisation de l’exercice libéral de la médecine générale, mode d’exercice le plus efficace en termes de coût, pour les soins de premier recours. Il faut revoir complètement le rôle du médecin généraliste – qui doit inclure la prévention et des missions de santé publique – et son mode de paiement, avec une dominante forfaitaire, et améliorer sa protection juridique et sociale.

 

 

← Page précédente                                                                                                             Page suivante →